"Aujourd'hui, le régime contrôle plus de la moitié du territoire, il tient les grandes villes, (...) il est clair qu'il a gagné", déclare, catégorique, l'expert sur la Syrie, Fabrice Balanche.
Armes chimiques, massacres de civils, accusations de crimes de guerre: les pires atrocités ont été commises tout au long des sept ans de ce conflit qui a fait plus de 350.000 morts depuis le 15 mars 2011. Et le bain de sang se poursuit au quotidien face à l'impuissance de la communauté internationale.
Ce conflit a débuté dans le cadre du Printemps arabe avec des manifestations pro-démocratie violemment réprimées par le régime. Le mouvement s'était alors transformé en insurrection armée, après l'apparition de factions rebelles.
Au fil des sept ans, la guerre s'est complexifiée avec l'implication de puissances étrangères comme la Russie, la Turquie et les Etats-Unis notamment, plusieurs fronts déchirant toujours le pays.
C'est le cas notamment dans l'enclave kurde d'Afrine (nord-ouest), cible depuis le 20 janvier d'une offensive de la Turquie contre une milice kurde considérée comme "terroriste" par Ankara mais qui, allié à Washington, a joué un grand rôle dans la lutte antijihadiste.
'Division de la Syrie'
En effet, le 7e anniversaire du conflit est aussi marqué par la déchéance des jihadistes de l'EI, après sa montée en puissance fulgurante en 2014 et la conquête de vastes territoires.
Défait en Irak, le groupe ultra-radical, responsable de multiples attentats dans la région et au-delà, est aujourd'hui acculé dans quelques poches sur le sol syrien.
La ville de Raqa, sa capitale de facto dans le nord, a été conquise en octobre par les Forces démocratiques syriennes (FDS), l'alliance de combattants kurdes et arabes soutenue par Washington.
Il sera "très difficile pour l'EI de se remettre debout", estime Joshua Landis, spécialiste de la Syrie et professeur à l'Université d'Oklahoma (Etats-Unis).
La fin des grandes batailles contre les jihadistes permet désormais aux puissances internationales et régionales de se concentrer sur l'élargissement de leur sphère d'influence en Syrie.
"La tendance principale va être la division de la Syrie", dit M. Landis, en désignant notamment les Etats-Unis, soutien des forces kurdes, mais aussi la Turquie, appui traditionnel des rebelles.
Dans le nord-est, se trouvent les territoires semi-autonomes kurdes, où sont stationnées des troupes de Washington. Dans le nord-ouest, Ankara soutient des rebelles dans la province d'Idleb et d'Alep, et mène avec des insurgés syriens l'offensive contre la région kurde d'Afrine.
"L'influence turque et américaine, sur le terrain en Syrie, va continuer à s'étendre", confirme Nicholas Heras, expert au Center for a New American Security à Washington.
'Tragédie humaine'
Un état de fait qui n'empêche pas le régime syrien de vouloir reconquérir l'intégralité du pays.
D'abord très affaibli, le pouvoir de Damas a pu changer la donne grâce au soutien militaire de la Russie, son allié indéfectible intervenu à ses côtés fin 2015.
Le régime a déjà reconquis plus de la moitié du pays, multipliant les victoires face aux rebelles et aux jihadistes. Fin 2016, la capture totale d'Alep (nord), deuxième ville de Syrie et ancien poumon économique du pays, avait constitué un tournant symbolique.
"Le fait que M. Assad ait repris Alep et qu'il contrôle Damas, les gens se disent que la révolution est finie, qu'il a gagné le conflit. Psychologiquement cela a un gros impact", résume M. Balanche, analyste auprès de la Hoover institution à l'université de Stanford.
Si le régime espère "un rythme accéléré pour reconquérir toute la Syrie", Moscou agit avec l'idée qu'en 2018 "la fragmentation de la Syrie va se consolider", estime M. Heras.
Le conflit, sans merci pour les civils, a jeté sur la route de l'exil une grande partie de la population: plus de cinq millions de réfugiés ont dû partir à l'étranger, et au moins six millions de personnes ont été déplacées à l'intérieur du pays.
"Ces sept années de guerre laissent derrière elles une tragédie humaine aux dimensions colossales. Pour sauver des vies, il est grand temps de mettre fin à ce conflit dévastateur", déplorait récemment le Haut commissaire de l'ONU aux réfugiés, Filippo Grandi.
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