Face à l'ampleur de la controverse, le directeur général de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), Roberto Azevêdo, a mis en garde lundi contre le risque d'une escalade de "représailles" commerciales, dont personne selon lui ne sortirait gagnant.
"On sait quand et comment cela commence mais on ne sait pas ni comment ni quand cela se termine", car une escalade de "représailles réciproques" en matière commerciale est ensuite "difficile à inverser", a déclaré le dirigeant de l'OMC depuis Brasilia.
A Bruxelles, la commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström a souligné - sans toutefois mentionner explicitement les États-Unis ou M. Trump - que le protectionnisme était "utilisé comme une arme pour nous menacer et nous intimider".
"Mais nous n'avons pas peur et nous nous défendrons contre les intimidateurs", a-t-elle ajouté.
Pour le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire, "le plus gros risque serait de ne pas prendre de risque et ne pas riposter" à la décision de l'administration américaine.
"Nous ne voulons pas entrer en guerre commerciale, mais nous allons défendre nos intérêts économiques, nos usines, notre industrie et nos emplois", a-t-il déclaré lundi soir à Bruxelles.
Le président américain a pour sa part assuré dans un tweet que son secrétaire au Commerce Wilbur Ross allait discuter avec des représentants européens de "l'élimination des importantes barrières douanières qu'ils utilisent contre les USA".
Malgré les mises en garde des partenaires commerciaux des Etats-Unis, Donald Trump a formalisé jeudi dernier sa décision d'imposer des taxes à l'importation de 25% sur l'acier et de 10% sur l'aluminium. Elles doivent entrer en vigueur d'ici une dizaine de jours.
Mexique et Canada épargnés
Washington a toutefois décidé d'épargner ces mesures au Canada et au Mexique, afin de pousser les deux partenaires à faire des concessions dans la renégociation de l'Aléna (Accord de libre-échange nord-américain). Lors d'un entretien téléphonique lundi avec le Premier ministre canadien Justin Trudeau, Donald Trump a "insisté sur l'importance de conclure rapidement" ces négociations, selon la Maison Blanche.
L'UE, de son côté, exige d'être exempté des taxes américaines, à l'instar du traitement réservé à Ottawa et Mexico.
Mais de premières discussions samedi à Bruxelles entre les Européens et le représentant américain au commerce, Robert Lighthizer, en présence également du ministre japonais de l'Économie, Hiroshige Seko, s'étaient avérées infructueuses.
Pire, quelques heures plus tard, le président américain indiquait que si l'UE voulait être exemptée des taxes sur l'acier et l'aluminium, elle devait "abandonner" ses propres barrières douanières et règlementaires sur les produits américains.
Les Européens ont été surpris par ces déclarations et leur imprécision. "Nous attendons toujours des éclaircissements", a rappelé Mme Malmström lundi.
"Les États-Unis et l'UE ne peuvent en aucun cas entrer dans une escalade commerciale", a prévenu le nouveau ministre espagnol de l'Économie, Roman Escolano, en arrivant à une réunion avec ses collègues de la zone euro à Bruxelles, résumant le sentiment général dans l'UE.
Donald Trump dénonce en particulier les droits de douane de 10% imposés par l'UE sur les véhicules, alors que les droits américains sont de 2,5%.
"Pour les pays avec lesquels nous n'avons pas d'accord de libre-échange, les droits de douane sont de 10% sur les voitures, c'est vrai", a reconnu Mme Malmström.
'Camions et pick-ups'
"Mais les Etats-Unis ont des droits très importants, de 25%, sur les camions et les pick-ups", a-t-elle ajouté, rappelant que les négociations avec Washington en vue d'un accord de libre-échange (TTIP ou Tafta), gelées depuis l'arrivée de M. Trump, avaient pour objectif d'éliminer toutes ces taxes.
Les taxes douanières entre l'UE et les Etats-Unis s'élèvent -- selon l'Union -- en moyenne à 3%.
L'UE a préparé des contre-mesures si Donald Trump persiste dans ses intentions.
La plus immédiate, applicable en trois mois, consisterait à lourdement taxer, certains produits américains emblématiques comme les jeans, les motos de grosse cylindrée et le beurre de cacahuète.
L'UE envisage également de mettre en oeuvre des mesures dites "de sauvegarde" pour protéger son industrie des importations étrangères d'acier et d'aluminium.
Elle prévoit, enfin, de déposer, le cas échéant, une plainte devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC), estimant que les mesures prises par les Etats-Unis ne servent qu'à avantager leurs entreprises.
A ce jour, aucun pays n'a toutefois encore saisi l'OMC d'une telle plainte, a indiqué lundi à Brasilia son directeur général.
L'affrontement entre Donald Trump et l'Union européenne fait le jeu de la Chine, de loin le premier producteur mondial d'acier, qui est régulièrement accusée d'être à l'origine de la surcapacité dans le secteur en raison de ses subventions massives.
La Chine inonde le marché mondial avec de l'aluminium et de l'acier à des prix au rabais, provoquant ainsi une "concurrence déloyale" pour les sidérurgistes nord-américains, a ainsi accusé lundi le Premier ministre canadien Justin Trudeau.
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