"Là par exemple ça ne va pas." Assis sur son fauteuil roulant, Francis Mouton commente l'aménagement de la ville et dès les premiers mètres, un premier obstacle se présente à lui : un dévers non signalé près de l'arrêt de bus "Théâtre des Arts".
Quelques mètres plus loin, c'est le distributeur de billets qui n'est pas accessible aux personnes en fauteuil roulant, "il y a bien une rampe d'accès mais il n'y a pas assez de place pour que la personne en fauteuil fasse demi-tour", commente Pierre Lautard, représentant de l'Association des paralysés de France.
Pavés, rues étroites et bâtiments biscornus
"Il y a des choses à faire pour rendre la ville plus accessible aux personnes en fauteuil mais aussi malvoyantes, sourdes ou même aux poussettes. On pourrait par exemple remettre des joints entre les pavés rue du Gros-Horloge parce qu' en ce moment, j'ai l'impression d'avoir un marteau-piqueur entre les mains !", s'exclame Pierre Lautard, en poussant le fauteuil de Francis Mouton. Avec ses pavés, ses rues étroites et ses bâtiments biscornus, Rouen n'a pas l'architecture la plus adéquate pour la mobilité des personnes handicapées, âgées ou des poussettes.
"Tout ne pourra jamais être accessible", observe Pierre Lautard, notamment car "certaines lois se télescopent", comme par exemple celles sur l'accessibilité et celles sur la sécurité. Néanmoins, Francis Mouton et Pierre Lautard remarquent que des efforts ont été faits avec par exemple des abaissements de trottoirs ou encore des marques d'appel à la vigilance au sol pour les malvoyants. La plupart des magasins possèdent de plus, une rampe d'accès en pente douce, des rampes amovibles ou sont de plain-pied. Mais tout n'est pas parfait. Pierre Lautard cite l'exemple des commerçants qui mettent leur magasin aux normes avec des cabines d'essayage adaptées mais qui sont "utilisées comme débarras".
Journées de sensibilisation, travaux, actions
La Ville se mobilise pour améliorer son accessibilité. Elle a voté en 2016, un agenda d'accessibilité programmé pour réaliser des travaux pour rendre les bâtiments publics accessibles dans tous les secteurs.
La Ville de #Rouen s'est dotée de deux mises à l'eau pour les piscines Boulingrin et Diderot à destination des personnes en situation de #handicap. https://t.co/6PxuGYDDdk
— Ville de Rouen (@Rouen) 7 mars 2018
Des travaux ont par exemple été faits sur l'île Lacroix l'an dernier pour rendre le cheminement possible pour tous, jusqu'à la patinoire. Dans le budget 2018, les travaux d'accessibilité représentent 1,8 million d'euros.
Hélène Klein, adjointe à la mairie de Rouen, chargée de la lutte contre les discriminations, explique que des actions de sensibilisation sont également menées, comme par exemple le 20 mars prochain, lorsque 8 classes vont participer à des parcours en fauteuil roulant ou avec des lunettes qui déforment la vue, à la Halle aux Toiles.
L'adjointe au maire a de nombreux projets, comme par exemple remettre un prix de l'accessibilité au commerçant qui aura fait le plus d'aménagements. Hélène Klein demande une "intelligence collective" et regrette les incivilités : en 2017, il y a eu 894 verbalisations pour des stationnements sur les places handicapées.
Hélène Klein mise aussi beaucoup sur le projet "Cœur de métropole". Un cheminement plus agréable sera notamment construit pour aller à la cathédrale mais pour cet espace classé, la mairie doit travailler avec les bâtiments de France.
Des transports en commun accessibles
Du côté des transports en commun, il y a également du mieux d'après Pierre Lautard car, par exemple, les conducteurs des Transports en commun de l'agglomération rouennaise (TCAR) ont des formations avec des modules de sensibilisation au handicap et les bus sont équipés de rampes d'accès amovibles ou alors les trottoirs sont piles à la hauteur des portes des bus.
Une accessibilité qui arrange bien Nathalie Mbemba. Avec la poussette de son petit garçon, cette jeune maman n'observe "pas de difficulté particulière" dans la ville. "Les bus sont bien et les supermarchés ou grands magasins s'arrangent pour que l'accès soit facile avec des escalators ou des ascenseurs."
"Aucune amélioration"
Mais parfois, la situation n'est pas aussi simple pour les malvoyants. Dominique Lecanu bénéficie d'une télécommande sur laquelle il appuie lorsqu'il arrive près d'un passage piéton. Des haut-parleurs placés sur les feux tricolores lui indiquent alors, via une musique ou un message, si le feu est rouge ou vert pour les piétons. Un système ingénieux, cependant, Dominique Lecanu constate régulièrement que le système ne fonctionne pas.
Autre souci pour ce malvoyant, plusieurs feux de la ville ont été supprimés, ce qui rend la traversée plus difficile.
À ce constat, Nicolas Soulacroix, responsable du service voirie et mobilité à la Métropole, répond que certains d'entre eux créaient de la congestion ou n'étaient pas nécessaires. Pour ce qui est du quartier Jeanne-d'Arc, il s'agit d'un "mauvais tempo" car il est prévu des travaux sur le secteur. "L'idée est de créer une zone de rencontre dans laquelle les automobilistes se sentiront dans une zone piétonne et le piéton ne se sentira pas en danger."
Mais pour Dominique Lecanu, la suppression de certains feux tricolores est symptomatique d'une ville dans laquelle il ne voit "aucune amélioration", contrairement au Havre où 95 % des feux sonores fonctionnent. "Je ne dis pas que c'est facile mais il y a des choses mieux à faire. Il faudrait peut-être mettre un bandeau sur les yeux des décideurs pendant une journée pour qu'ils comprennent la situation !"
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