Originaire d'un milieu pauvre de Picardie, cet ancien cariste-magasinier de 58 ans est jugé depuis lundi pour avoir violé, tué et atrocement mutilé Moktaria Chaïb, le 20 décembre 1997 puis Marie-Hélène Gonzalez, le 16 juin 1998. Les jurés verront et entendront les détails sordides de ces crimes, mardi et mercredi.
Il lui est aussi reproché d'avoir tenté de violer une autre femme et d'en avoir laissé une quatrième pour morte. Elles seront au centre des débats lors de la troisième semaine.
A l'origine de ce déchaînement de violence, il faut pour les spécialistes remonter au péché originel: il avait 16 ans lorsqu'il a agressé sexuellement Marie-Hélène dans une forêt. A l'époque, les gendarmes avaient convaincu la victime de ne pas porter plainte, arguant que son bourreau était un pauvre hère.
Il n'avait reçu, selon son terme lundi, qu'une "dérouillée" de son père. Plus de 40 ans après, alors que cette quinquagénaire s'est dite encore "très marquée", Rançon n'a rien trouvé à lui dire. Pas même une excuse.
Aux yeux des experts, c'est "peut-être" là qu'il a découvert "le plaisir".
"Le plus important dans ses agressions, c'est le moment où il maîtrise et étrangle", le refus pourrait constituer la source de sa violence et même "une source d'excitation", a remarqué le Dr Roger Franc, psychiatre, pour lequel il agit quand il est "frustré"
Quant aux mutilations, les psychiatres y ont relevé aussi une volonté "d'appropriation". Voire éventuellement "une dimension fétichiste". Rançon a lui, au cours de l'instruction, affirmé qu'il avait découpé les parties génitales et les seins de deux victimes, ainsi que la tête et les mains de la seconde pour effacer les traces.
"Sexuellement zéro"
Il y a "un certain sadisme", une "méconnaissance de l'autre" a assuré le Dr Franc qui a vu dans les meurtres "un scénario pervers". Ce n'est pas "Hannibal Lecter", a rétorqué le Dr Delpla, qui ne voit qu'un "vide psychique", une "absence totale d'empathie pour l'autre".
Cette violence, ses ex-compagnes l'ont en tout cas mise en lumière. Elles ont raconté leur calvaire, avec pour points communs les coups de pied ou de poing qui ont commencé à pleuvoir quand elles sont tombées enceintes.
"Sa violence a décuplé après la naissance de notre fille", a souligné Lolita, dont Rançon avait assuré que c'était l'amour de sa vie. Il l'a connue en 2005, elle avait 16 ans lui 45 ans.
Selon elle, il a failli la tuer à coup de couteau. Elle dit l'avoir finalement quitté en 2012 parce qu'il avait voulu l'étrangler.
Tête baissée, bras croisés, yeux toujours mi-clos Rançon, n'a jamais fait un geste quand ses ex ont parlé. Ni donné la moindre explication sur son changement d'attitude une fois sa compagne enceinte.
Il nie même totalement la moindre violence, même s'il a été condamné pour ces agissements contre Lolita. "Un ramassis de mensonges", a affirmé Rançon, qui a vécu une enfance miséreuse, dans une maison en bois à Hailles (Somme). Jusqu'à ses 18 ans, il y a partagé la chambre de ses parents âgés.
"Ça vous a gêné ?", lui a demandé le président Régis Cayrol. "Non, il n'y avait pas" d'autres solutions. Il n'y avait qu'une pièce".
"Quand j'étais petit, j'étais malheureux. J'étais seul, j'avais pas d'ami, j'étais le pestiféré du village", a repris Rançon, dont la mère était "simplette" et dont le père, retraité, qui a eu 17 enfants en deux mariages, ne s'est jamais occupé.
Dans sa vie, Rançon s'est reconnu une passion "la voiture". Il s'était ainsi acheté une Renault 5 Alpine qui, selon lui, lui a permis de faire sa première conquête féminine.
Sinon, il s'est toujours senti inférieur: "trop gros, trop moche", dixit Lolita, mais aussi, selon les experts, "sexuellement zéro", "sexe trop petit" et "éjaculateur précoce".
Le verdict est attendu le 26 mars.
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