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Syrie: le régime accentue son emprise sur la Ghouta, privée d'aide humanitaire

Le régime syrien a accentué son emprise sur le fief rebelle dans la Ghouta orientale, cible depuis trois semaines d'un déluge de feu d'une rare violence, les autorités empêchant jeudi l'entrée d'un convoi d'aides vital pour une population en proie à une grave crise humanitaire.

Syrie: le régime accentue son emprise sur la Ghouta, privée d'aide humanitaire
Des soldats russes se tiennent le 8 mars 2018 à un check-point à la péripéhérie de Damas près d'un camion d'aide humanitaire destinée aux habitants d'une enclave rebelle - STRINGER [AFP]

Appuyé par l'indéfectible allié russe, le pouvoir de Bachar al-Assad a reconquis plus de la moitié de l'enclave rebelle, après avoir lancé le 18 février une offensive de grande ampleur qui, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), a tué plus de 900 civils dans ce dernier bastion insurgé aux portes de la capitale.

Sur un autre front, les forces turques et les groupes rebelles pro-Ankara ont pris le contrôle de la localité stratégique de Jandairis, dans l'enclave d'Afrine (nord-ouest), ou elles mènent depuis le 20 janvier une offensive pour chasser les forces kurdes de cette région frontalière de la Turquie, selon l'OSDH.

Dans la Ghouta orientale, les bombardements ont empêché jeudi une nouvelle tentative de livraison d'aides à la population, les forces du régime poursuivant sans répit leur offensive terrestre et leur pilonnage meurtrier, malgré les appels d'une communauté internationale impuissante face au bain de sang.

Selon l'Observatoire, le régime cherche à scinder l'enclave pour affaiblir les deux forces principales du fief rebelle, Jaich al-Islam (nord) et Faylaq al-Rahmane (sud).

Des combats entre rebelles et forces du régime se déroulent au coeur même de l'enclave, en périphérie de Douma mais aussi des localités de Hammouriyé et Jisrine, plus au sud, cibles de raids aériens, d'après la même source.

Chaque jour, dans les hôpitaux, les blessés affluent. Parmi eux, des enfants terrorisés, en pleurs et au visage ensanglanté, parfois blanc de poussière, selon les correspondants de l'AFP.

A Hammouriyé, un correspondant de l'AFP a vu mercredi deux hommes au sol près d'une moto, le corps pris par les flammes d'un incendie provoqué par un raid, des secouristes tentant d'éteindre le feu. Ailleurs, un troisième homme gisait à même le sol, près d'une marre de sang.

Un responsable militaire a indiqué à des journalistes que les autorités syriennes ont mis en place un nouveau couloir humanitaire, reliant la périphérie de la capitale au sud de l'enclave, pour permettre la sortie des civils.

Convoi immobilisé

Les quelque 400.000 habitants de l'enclave, assiégés depuis 2013, subissent au quotidien pénuries de nourriture et de médicaments, et vivent désormais terrés dans les sous-sols pour échapper au déluge de feu.

Des aides médicales et de la nourriture devaient y être distribuées jeudi mais l'ONU et des ONG ont annoncé que la livraison avait été ajournée.

La situation "sur le terrain (...) ne nous permet pas de mener l'opération" à bien, a indiqué à l'AFP Ingy Sedky, une porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

"Aujourd'hui, l'ONU et ses partenaires n'ont pas pu retourner à Douma (...) car le mouvement du convoi n'a pas été autorisé par les autorités syriennes pour des raisons de sécurité", a indiqué Jens Laerke, porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha), à Genève.

Lundi, un convoi d'une quarantaine de camions d'aide alimentaire et médicale avait dû abréger sa mission en raison des bombardements sur Douma, la grande ville de la Ghouta. Initialement, les aides qui devaient être livrées cette semaine étaient destinées à 70.000 personnes.

Seule la moitié de l'aide alimentaire prévue lundi avait pu être livrée, a indiqué une porte-parole à Damas d'Ocha, Linda Tom.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a émis le souhait mercredi que de l'aide puisse être acheminée "tous les jours" dans l'enclave, selon un diplomate.

Fin février, le Conseil de sécurité avait adopté une résolution réclamant un cessez-le-feu de trente jours dans toute la Syrie, ravagée depuis 2011 par une guerre qui a fait plus de 340.000 morts.

Par la suite, la Russie a décrété une "pause humanitaire" quotidienne de cinq heures dans l'enclave rebelle mais, mercredi, les bombardements ont encore tué 91 civils, selon l'OSDH.

'Je vais suffoquer'

Par ailleurs, au moins 60 personnes ont souffert mercredi soir de difficultés respiratoires à Saqba et Hammouriyé après des frappes aériennes, a indiqué l'OSDH.

Des cas de suffocation similaires ont déjà été rapportés à deux reprises ces derniers jours, selon l'Observatoire.

"En raison d'une attaque au gaz de chlore (...), des patients souffrent de difficultés respiratoires sévères", a indiqué la Société médicale syro-américaine (SAMS), une ONG qui soutient des centres médicaux en Syrie.

A Hammouriyé, un correspondant de l'AFP a pu voir des dizaines de personnes, femmes et enfants, quitter des sous-sols et s'installer sur un toit dans l'espoir de pouvoir mieux respirer.

Les parents ont déshabillé les enfants qui toussaient sans cesse pour les laver à grande eau, et tenter d'éliminer une possible présence de gaz toxique sur leur corps.

"Je vais suffoquer", hurlaient deux enfants, alors que des secouristes les portaient pour les emmener se faire soigner.

Le régime, qui a plusieurs fois démenti utiliser des armes chimiques, a été dénoncé ces dernières semaines à la suite d'attaques présumées au gaz de chlore.

Ces accusations, "irréalistes" selon Bachar al-Assad, ont provoqué un tollé sur la scène internationale, Washington et Paris brandissant la menace de frappes en Syrie.

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