"C'est un chiffre bien adapté, l'économie est en transition entre une période de croissance rapide et une phase de développement qualitatif", a insisté lundi le Premier ministre Li Keqiang, dans un discours-fleuve ouvrant la session annuelle du Parlement.
Certes, le géant asiatique s'était déjà donné en 2017 comme objectif une progression du PIB "d'environ 6,5%", mais en affichant son intention "de faire mieux si possible" -- une formule que M. Li s'est bien gardé de répéter cette année.
La croissance avait finalement accéléré à 6,9% l'an dernier. Une progression de 6,5% marquerait un vif ralentissement et la pire performance chinoise en 28 ans.
"Nous sommes capables (...) de parvenir à une croissance de meilleure qualité, plus efficace et plus durable", a fait valoir M. Li devant l'Assemblée nationale populaire (ANP).
L'idée est toujours de rééquilibrer l'économie vers la consommation intérieure, les services et l'innovation technologique -- au détriment d'industries lourdes endettées et surcapacitaires... et au prix d'un essoufflement de l'activité.
Significativement, aucune nouvelle cible de PIB à long terme n'avait été dévoilée à l'automne lors du congrès quinquennal du Parti communiste.
'Gestion des risques'
Sans surprise, Li Keqiang a insisté lundi sur "trois batailles décisives": contre la pauvreté, contre la pollution, et surtout contre les risques financiers associés au colossal endettement public et privé du pays (plus de 250% du PIB).
"Nous allons défendre le bleu du ciel, (...) durcir les normes sur les émissions polluantes" et renforcer les contrôles sur l'endémique pollution des sols, a martelé le responsable. Des nombreuses usines ont déjà dû cesser ou réduire leur activité cet hiver.
Surtout, Pékin entend "endiguer et désamorcer les risques liés à la dette des gouvernements locaux" et durcir la supervision du secteur financier, épinglé pour ses produits d'investissement jugés dangereux.
Le régime s'est également attaqué aux conglomérats privés lourdement endettés après une frénésie d'investissements "irrationnels": l'assureur Anbang est récemment passé sous contrôle étatique.
Enfin, les mesures de relance économique par la dépense publique seront sous pression: la Chine a abaissé son objectif de déficit budgétaire pour la première fois depuis 2012, à 2,6% du PIB contre 3% ces deux dernières années, a précisé M. Li.
"C'est un signe que le gouvernement veut obliger les autorités locales à restreindre leurs dépenses (...) La priorité est la gestion des risques", observent les analystes de la banque ANZ, selon qui ce déficit était de... 3,7% l'an dernier.
'Secteur public renforcé'
Épinglées à la fois pour leur endettement, leur production excédentaire et leurs émissions polluantes, les industries lourdes -- charbonniers, sidérurgistes ou cimentiers -- sont particulièrement ciblées.
Selon Li Keqiang, la Chine réduira de 30 millions de tonnes supplémentaires en 2018 les capacités de ses aciéristes et de 150 millions de tonnes sa production de charbon. Pékin s'était engagé à sabrer ses capacités dans l'acier de 150 millions de tonnes entre 2016 et 2020... promesse en passe d'être concrétisée dès cette année.
Le durcissement du crédit et la campagne antipollution devraient logiquement pénaliser l'économie.
Mais M. Li mettait l'accent lundi sur les "nouveaux moteurs de croissance": électronique, aéronautique, internet... Les firmes privées et l'innovation seront soutenues à coups d'allègements fiscaux et de simplifications administratives, a-t-il assuré.
L'industrie manufacturière sera "entièrement ouverte" aux capitaux étrangers et l'ouverture du secteur financier se poursuivra, a-t-il promis sans précisions.
Le régime n'entend toutefois pas lâcher sa poigne sur l'économie.
"Nous ne montrerons aucune hésitation à consolider et développer le secteur public", a martelé le Premier ministre, appelant à réformer en profondeur les grands groupes étatiques, qui dominent des secteurs entiers, pour les rendre "plus efficaces, plus compétitifs" et plus rentables.
Virtuel président à vie, Xi Jinping pourrait être en mesure de tolérer un douloureux ralentissement économique en contrepartie de son agenda de "réformes".
Mais ses réformes n'ont rien de libérales, "elles ne remettent nullement en cause l'interventionnisme excessif de l'Etat", avertit Julian Evans-Pritchard, de Capital Economics.
Ce que confirme le politologue hongkongais Willy Lam: "Seules les réformes qui ne mettront pas en cause l'autorité du Parti seront appliquées".
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