Depuis dimanche, 426 civils, dont 98 enfants, ont péri dans les raids aériens et les tirs d'artillerie intensifs et incessants menés par l'armée du président Bachar al-Assad contre cette vaste région près de Damas, devenue un "enfer sur Terre" selon les termes du patron de l'ONU Antonio Guterres.
Faisant fi des appels internationaux à cesser le bain de sang, le régime a de nouveau bombardé plusieurs localités de la Ghouta orientale assiégée, qui ont fait vendredi neuf morts, dont deux enfants, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
"Le bilan pourrait être revu à la hausse", a mis en garde cette ONG. "Il y a de nombreux blessés dans un état critique et des victimes sous les décombres".
Cette campagne aérienne est d'une rare intensité, même pour un pays ravagé depuis 2011 par une guerre qui a fait plus de 340.000 morts. Elle prélude à une offensive terrestre de l'armée pour reprendre cette région selon un média proche du pouvoir et l'OSDH.
A Douma, la principale ville du fief rebelle, quelques rares habitants se sont aventurés vendredi dans les rues pour acheter à manger pour leurs familles terrées dans les sous-sols, ou s'enquérir sur la santé de proches, selon un correspondant de l'AFP sur place.
Mais en un clin d'oeil, ils se sont sauvés à la recherche d'un abri après la chute de roquettes à proximité.
'Faire pleurer les pierres'
Soumis à un siège asphyxiant depuis 2013 par les forces du régime, les quelque 400.000 habitants de la Ghouta subissent déjà au quotidien pénuries de nourriture et de médicaments.
Avec les morts à enterrer et les bouches à nourrir, ils ne sont pas très au fait des détails des tractations à l'ONU en vue d'une trêve.
"L'ONU se dit préoccupée et demande un cessez-le-feu, la France condamne, mais au final ils nous ont rien apportés", lâche Abou Moustafa, un habitant de Douma venu accompagner un blessé à l'hôpital, interrogé par l'AFP.
"Au quotidien, il y a des frappes, des destructions, c'est à faire pleurer les pierres, chaque jour il y a quelqu'un qui perd un proche", déplore le quinquagénaire.
Selon l'OSDH, l'aviation de la Russie, qui aide militairement le régime dans le conflit, participe aux frappes sur la Ghouta. Moscou a démenti.
Cette région est le dernier bastion des rebelles situé aux portes de Damas, et les combattants tirent régulièrement obus et roquettes sur la capitale, fief du régime et symbole de son pouvoir.
Ces bombardements, mis en avant par le régime pour justifier sa campagne militaire, ont fait au moins 16 morts depuis dimanche.
Le scénario qui se déroule aujourd'hui dans la Ghouta n'est pas sans rappeler ce qui s'est passé dans plusieurs fiefs rebelles, dont la ville d'Alep en 2016, écrasée par des bombardements et un siège asphyxiant pour forcer les combattants antirégime à déposer les armes.
Moscou avait indiqué avoir proposé aux rebelles d'évacuer la Ghouta mais qu'ils avaient refusé.
'Nouvel Alep'
Déclenché en mars 2011 par la répression de manifestations pacifiques pro-démocratie, le conflit en Syrie qui a opposé d'abord les rebelles au régime, s'est complexifié avec l'implication de groupes jihadistes et de puissances régionales et internationales aux intérêts divergents.
Après plusieurs tentatives vaines, le Conseil de sécurité doit voter à 16H00 GMT sur un projet de résolution demandant un cessez-le-feu de 30 jours dans le pays en guerre destiné à permettre l'arrivée d'aide humanitaire et les évacuations médicales dans la Ghouta orientale. Mais on ignore si la Russie, qui a droit de véto, soutiendra ce texte.
Une nouvelle version légèrement amendée du projet de résolution négocié depuis deux semaines a été distribuée aux membres du Conseil.
Jeudi à New York, le représentant syrien à l'ONU, Bachar Jaafari, a réitéré la détermination du régime à reconquérir l'ensemble du territoire, y compris la Ghouta.
"Oui la Ghouta orientale deviendra un nouvel Alep", mais Alep aujourd'hui, "ce sont des millions de personnes vivant tout à fait normalement", a-t-il dit.
Grâce à l'intervention militaire russe en 2015, le régime qui était en mauvaise posture, a renversé la donne en multipliant les victoires face aux rebelles et aux groupes jihadistes, jusqu'à reprendre le contrôle de plus de la moitié du territoire.
Les Etats-Unis ont ainsi dénoncé la "responsabilité particulière" de Moscou, assurant que "sans le soutien apporté par la Russie à la Syrie, cette dévastation et ces morts n'auraient pas eu lieu".
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