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En Syrie, la vie sous terre des habitants d'un fief rebelle pilonné

Au rythme des bombardements, Oum Jamal cuisine dans une cave sommairement aménagée où elle s'est réfugiée avec sa famille, après la destruction de sa maison par les frappes du régime syrien sur la Ghouta orientale.

En Syrie, la vie sous terre des habitants d'un fief rebelle pilonné
De la fumée et de la poussière s'élèvent d'une rue après des raids aériens du régime syrien sur la localité de Hammourié, dans le fief rebelle de la Ghouta orientale près de Damas, le 21 février 2018 - ABDULMONAM EASSA [AFP]

Comme elle, de nombreux habitants de ce fief rebelle à l'est de Damas ont trouvé refuge dans des sous-sols, après avoir fui un domicile en ruine, ou pour échapper à la violence meurtrière des raids aériens et tirs d'artillerie du régime de Bachar al-Assad.

"Nous ne sommes pas retournés une seule fois chez nous, nous restons ici jours et nuits", raconte Oum Jamal, vêtue d'une abaya noire et d'un voile serré encadrant son visage.

Avec son fils trentenaire et sa fille handicapée, cela fait plus d'un mois et demi que la quinquagénaire a abandonné la maison familiale, réduite en miettes par les frappes de l'armée, dans la localité de Madira.

"Notre maison a été bombardée, alors on est venu ici. Puis elle a été de nouveau touchée pendant qu'on était là, et elle s'est entièrement écroulée", poursuit-elle.

Avec son fils, elle a aménagé son nouvel habitat en installant des panneaux de tôle pour délimiter son espace, au centre de la cave glaciale au sol terreux.

"Quand les avions envahissent le ciel, mes voisins viennent se réfugier ici, avant de retourner chez eux quand la situation se calme", explique Oum Jamal, 56 ans. "Moi et mes enfants on reste ici", lâche-t-elle.

Froid et humidité

Mais durant les rares moments de répit, elle aussi se risque à sortir de sa cachette pour retrouver la lumière du jour et surtout s'approvisionner en bois et en eau.

A l'aide d'une hachette, elle coupe du bois pour se chauffer, puis remplit d'eau des bouteilles vides avant de retourner dans son abri.

Dans la cave, le bois est déposé sous un poêle en fer qu'elle a elle-même fabriqué, à l'entrée d'une tente jaune, sous laquelle elle dort avec ses deux enfants.

"On dort ici tous les trois, l'espace est très exigu", déplore la quinquagénaire.

"On vit dans le froid, sous la terre", lâche-t-elle, désignant un mur d'où s'écoule des eaux usées du bâtiment.

Assiégés depuis 2013 par les forces du régime, les quelque 400.000 habitants de la Ghouta sont actuellement confrontés à un nouveau déluge de feu du pouvoir, qui pilonne quotidiennement l'enclave.

Cinq jours de bombardements ont ainsi tué plus de 380 civils, dont 90 enfants, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Dans une autre cave de Madira, alors que gronde à l'extérieur l'aviation du régime, des femmes vêtues de noir, entourées d'enfants, servent des assiettes de taboulé, une salade à base de persil.

Le vacarme des appareils militaires s'intensifie, et l'une d'elle agrippe alors le genou de sa soeur, assise à ses côtés.

Trois enfants jouent au ballon dans une pièce attenante, où un lit et une armoire ont été installés.

'Privé de vie'

Depuis des années déjà, les habitants se sont habitués à cette "vie des caves", déplore Yousra Ali, qui a élu domicile dans les sous-sols de l'école Dar al-Salam à Erbine, autre localité de la Ghouta orientale.

Souffrant d'une maladie cardiaque l'ayant contrainte à subir une opération chirurgicale, elle raconte, les yeux remplis de larmes, ses souffrances au quotidien.

"Je n'ai plus de médicaments (...) Nous vivons sans soleil, ni air frais. On est privé de vie ici", lâche la quadragénaire.

Dans les salles de classe souterraines, les murs sont décorés de fleurs. Face à l'afflux des habitants, l'espace a été transformé en abri collectif. Matelas et couvertures s'entassent dans tous les coins, du linge sèche sur les jeux pour enfants.

"Nous sommes 14 femmes et enfants à vivre dans une pièce de 2,5 mètres de large, sans toilettes ou espace pour se laver", déplore de son côté Oum Abdou.

"Ma maison a été détruite, mais bon, grâce à Dieu, on prend notre mal en patience", soupire la femme de 53 ans.

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