"Il n'y a pas de choix parfait", résumait récemment le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot. "Je suis obligé de tenir compte des éleveurs, donc je suis obligé malheureusement de prendre des mesures qui me font mal aux tripes, de dire il va quand même falloir tuer quelques loups", lançait-il ainsi à des enfants dans l'émission Au Tableau sur C8.
Résultat, le plan loup 2018-2023, publié lundi après plus d'un an de concertations tendues, fixe un plafond d'abattage de 40 loups pour 2018. Toutefois, ce nombre sera "actualisé" une fois connus les chiffres de population au printemps et porté à 10% de la population.
Fin 2016, la population était estimée à environ 360 individus, contre 292 en 2016. Et les scientifiques recommandent de ne pas abattre plus de 10 à 12% de l'effectif chaque année pour ne pas remettre en cause la viabilité de l'espèce et atteindre les 500 individus que vise le gouvernement d'ici 2023.
Ainsi, à partir de 2019, le plafond annuel sera fixé à 10% de la population, avec possibilité de relèvement à 12% "en cas d'atteinte du plafond avant la fin de l'année civile et de dommages particulièrement importants", a précisé le ministère de la Transition écologique.
Les tirs de prélèvement ne pourront se faire qu'entre septembre et décembre, mais les éleveurs pourront "toute l'année" se défendre "en cas d'attaque", a-t-il ajouté.
"Notre inquiétude, c'est qu'il faudra l'accord du préfet coordonnateur pour dépasser la limite des 40 loups autorisée quand il y a une attaque", a toutefois réagi la présidente de la FNSEA Christiane Lambert lors d'une conférence de presse. "Nous avons demandé qu'à chaque attaque, on tue le loup en cause. Cela permet d'éliminer le loup agressif et d'apprendre aux autres ce qui se passe quand on s'approche des troupeaux", a-t-elle ajouté.
'Dépassionner le débat'
Côté défenseurs de l'environnement, le mécanisme n'a pas non plus été bien accueilli. "Le tir indifférencié de loups est plus qu'inefficace, contreproductif (éclatement des meutes, dispersion, absence d'apprentissage de la cohabitation…)", ont commenté dans un communiqué commun plusieurs ONG dont WWF et France Nature Environnement, dénonçant un "manque de courage politique".
"L'Etat montre ainsi qu'il est dans une position défensive et qu'au lieu d'assumer un objectif de coexistence, il n'a ni le courage de rappeler le cadre de la loi ni celui d'affirmer qu'il est nécessaire que l'élevage s'adapte à la présence de cette espèce protégée", ont-elles ajouté.
"Nous faisons confiance aux acteurs et aux élus locaux pour dépassionner le débat et construire ensemble cette coexistence sur le long terme", ont commenté de leur côté Nicolas Hulot et le ministre de l'Agriculture Stéphane Travert en préambule du plan.
Espèce protégée, le loup, disparu en France dans les années 1930, est revenu par l'Italie à partir de 1992. Il est désormais présent dans les Alpes et en Provence, dans le sud du Massif central et dans l'est des Pyrénées et ses attaques se sont multipliées, de 1.400 brebis en 2000 à près de 10.000 en 2016.
Dans cette optique, le plan prévoit des aides à la protection des troupeaux (bergers pour le gardiennage, chiens, parcs électriques) et le développement de mesures de protection et d'effarouchement "innovantes".
Mesure particulièrement contestée dès l'annonce du projet, les indemnisations des éleveurs seront en revanche désormais soumises à la mise en place préalable de mesures de protection.
Une vingtaine de députés LREM de zones de montagne avaient réclamé début février une modification du plan, en particulier de cette mesure, "pas acceptable" selon eux.
Le plan plaide d'autre part pour de nouvelles études scientifiques pour mieux connaître et comprendre le comportement du loup et ses mécanismes d'attaque.
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