Lors d'une conférence de presse, le procureur Eric Schneiderman a cité "trois principes simples" que devrait respecter tout projet de reprise: "Les victimes devront être correctement dédommagées, les employés à l'avenir protégés et les cadres de la société coupables ou ayant permis (les abus) ne devront pas être récompensés".
"Toute offre qui enlève les frères Weinstein mais laisse intact le reste de la direction devrait être inacceptable", a-t-il aussi souligné, faisant valoir qu'"il s'agissait d'une culture d'entreprise omniprésente" que "n'importe quel cadre avec un sens de l'intégrité aurait dû faire cesser".
Le procureur, qui a assigné dimanche en justice The Weinstein Company (TWC) et les frères Weinstein pour n'avoir pas protégé leurs employés du comportement de prédateur sexuel du producteur, a pour autant assuré "ne vouloir bloquer aucun rachat" et vouloir éviter la mise en faillite de TWC.
Lundi matin, plusieurs médias américains avaient affirmé que cette assignation en justice avait fait capoter les négociations de reprise quasiment abouties menées par un groupe d'investisseurs emmené par une ex-responsable de l'administration Obama, Maria Contreras-Sweet.
Une source proche du dossier a cependant assuré à l'AFP que les négociations se poursuivaient lundi, tout en reconnaissant que "les commentaires du procureur ont donné une nouvelle perspective à ce rachat".
Selon M. Schneiderman, le projet de reprise prévoit de confier la présidence de la nouvelle société à David Glasser, ancien directeur des opérations du studio Weinstein, une proposition qu'il a qualifiée d'"inacceptable".
Plaintes 'choquantes'
"David Glasser, qui supervisait le département des ressources humaines, n'a pas mis fin à la discrimination, au harcèlement et aux abus alors même qu'il était responsable du traitement de dizaines de plaintes choquantes", a souligné le procureur.
Malgré le dépôt de "dizaines de plaintes formelles et de beaucoup d'autres informelles", a-t-il souligné, "aucune enquête formelle n'a jamais été lancée".
Le projet porté par Mme Contreras-Sweet ne prévoyait pas non plus dimanche de véritable indemnisation des victimes, selon M. Schneiderman, et aurait maintenu les victimes de Harvey Weinstein "prisonnières d'accords de confidentialité" signés avec l'entreprise qui "les auraient empêchées de témoigner".
Si une offre de rachat était finalisée sans respecter ces conditions, le bureau du procureur de New York pourrait la bloquer en justice, a précisé une responsable.
Ces conditions sévères se justifient, selon le procureur, par l'ampleur inédite des abus commis pendant plusieurs années au sein du célèbre studio, derrière la production de films à succès comme "Le discours d'un roi" ou "Django Unchained".
Une organisation au service
Les quatre mois d'enquête, qui ont permis d'éplucher les archives de la société et ont débouché sur l'assignation en justice de dimanche, ont révélé combien l'organisation de TWC s'était adaptée pour faciliter les obsessions sexuelles de Harvey Weinstein.
Un groupe d'employées de la société avait notamment "pour tâche principale" d'accompagner Harvey Weinstein à des événements et de faciliter ses "conquêtes", selon le procureur. Et un groupe était "responsable de nettoyer son bureau après ses contacts sexuels, y compris de rapporter aux femmes les vêtements qu'elles auraient laissés".
Depuis la révélation de l'affaire Weinstein début octobre, plus de cent femmes dont des célébrités comme Ashley Judd, Gwyneth Paltrow ou Salma Hayek ont accusé Harvey Weinstein de les avoir harcelées, agressées ou violées, souvent il y a des années, voire des décennies.
Plusieurs victimes présumées l'ont assigné en justice. Le producteur, aujourd'hui âgé de 65 ans, est sous le coup d'enquêtes menées par les polices de New York, de Los Angeles et de Londres, même s'il n'a fait l'objet d'aucune inculpation jusqu'ici.
Face à ces accusations, qui ont donné naissance au puissant mouvement anti-harcèlement #MeToo, les avocats d'Harvey Weinstein ont toujours démenti qu'il ait eu des rapports sexuels non consentis.
Le producteur déchu, invisible depuis le début du scandale, serait actuellement en traitement contre les addictions sexuelles dans un centre spécialisé de l'Arizona.
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