Pour préserver l'image de la Pologne à l'étranger, les conservateurs ont voulu en priorité bannir l'expression "camps de la mort polonais" pour désigner les installations des nazis allemands en Pologne occupée.
La loi prévoit trois ans de prison pour les personnes, y compris les étrangers, qui accusent la nation ou l'Etat polonais de participation aux crimes nazis.
Les dirigeants israéliens y voient une tentative - que Varsovie dément - de nier la participation de certains Polonais au génocide des Juifs, voire d'empêcher les survivants de la Shoah de raconter leur expérience.
M. Duda a demandé au Tribunal constitutionnel de vérifier sa conformité avec la loi fondamentale en ce qui concerne la liberté d'expression et la précision - qu'il trouve imparfaite - du passage imposant des peines de prison aux auteurs d'accusations.
"J'ai décidé de signer la loi et de saisir par la suite le Tribunal constitutionnel", a déclaré M. Duda à la télévision. "C'est une solution qui, d'un côté, préserve les intérêts de la Pologne, notre dignité et la vérité historique, pour que les jugements portés sur nous à travers le monde soient honnêtes, qu'on s'abstienne de nous diffamer en tant qu'Etat et nation".
"Mais, d'un autre côté, elle tient compte de la sensibilité des personnes pour qui la question de la mémoire historique de l'Holocauste reste exceptionnellement importante, et surtout de ceux qui ont survécu et qui, tant qu'ils peuvent, doivent raconter au monde leurs souvenirs de ce passé et leur expérience", a-t-il assuré.
La controverse avait mis les conservateurs nationalistes au pouvoir en Pologne dans une situation difficile: en y renonçant, ils auraient été accusés de céder aux pressions de l'étranger.
'Nier l'Holocauste'
"La Pologne a terriblement compliqué ses relations avec ses partenaires clés, les Etats-Unis, Israël et l'Ukraine, alors que déjà les relations au le plan européen sont au plus bas. La situation est vraiment mauvaise", a déclaré à l'AFP Stanislaw Mocek, politologue de l'Académie polonaise des Sciences.
"Le président ne pouvait pas faire autrement s'il veut être réélu. (...) Envoyer la loi au Tribunal constitutionnel n'a aucune signification, c'est une institution de façade", a-t-il conclu. (A l'issue d'une procédure controversée, le parti conservateur s'est assuré la loyauté du Tribunal.)
Dès le vote du texte par la chambre basse fin janvier, Israël l'avait vivement dénoncé: "Nous ne tolérerons pas qu'on déforme la vérité et réécrive l'Histoire ou qu'on nie l'Holocauste", avait lancé le Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Les Etats-Unis avaient exprimé leur "inquiétude" en des termes énergiques à la veille du vote du Sénat polonais le 1er février. La loi risque d'avoir des "répercussions" sur "les intérêts et relations stratégiques de la Pologne, y compris avec les Etats-Unis et Israël", avait mis en garde le département d'Etat.
"Ce n'est pas un jour heureux pour la Pologne", a commenté auprès de l'AFP Piotr Kadlcik, ancien président de la communauté juive de Varsovie et fondateur du site Jewish.pl. "On peut dire que le nombre d'amis de la Pologne reste très limité", a-t-il regretté.
L'opposition a condamné la décision de M. Duda.
Selon Slawomir Neumann, un des ténors de la Plateforme civique (PO, centriste), elle "ne fera qu'approfondir la crise diplomatique et envenimer les relations internationales de la Pologne avec son partenaire le plus important pour sa sécurité, les Etats-Unis".
Le président du Conseil européen Donald Tusk a estimé sur Twitter qu'au contraire "les auteurs de la loi ont promu dans le monde entier cette vile calomnie comme personne ne l'avait fait jusqu'à présent".
Un passage de la loi a tendu encore les relations avec l'Ukraine. Le président ukrainien Petro Porochenko a protesté contre des dispositions "absolument biaisées et catégoriquement inacceptables" permettant de poursuivre en justice ceux qui nient les crimes des nationalistes ukrainiens commis entre 1925 et 1950.
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