"Si l'on doit choisir une grande figure de la Modernité, Le Corbusier est incontournable", lance Jacques Sbriglio, commissaire-scénographe de l'exposition que l'institution aveyronnaise consacre à l'un des architectes majeurs du XXe siècle.
"Ce qui est intéressant, c'est l'alchimie qu'il a mené tout au long de sa vie entre ses créations plastiques et ses architectures", explique Jacques Sbriglio, lui-même architecte et spécialiste de Le Corbusier.
Cent-trente œuvres, peintures, sculptures et dessins provenant de la fondation Le Corbusier dialoguent dans un face-à-face didactique avec des photos de ses créations architecturales.
Une exposition "qui colle à l'esprit du Musée Soulages", affirme encore le scénographe qui a bâti un parcours muséal en trois époques. Un découpage proposé par Le Corbusier lui-même dans "un livre testament", +L'atelier de la recherche patiente+, paru en 1960, cinq ans avant sa mort.
Il y donne une lecture de son travail créatif, qui s'inscrit dans trois courants artistiques : La période "Puriste" (1920-1928), puis la période des "Objets à réactions poétiques" (1928-1939) et enfin la période "Brutaliste", celles où il va réaliser ses œuvres majeures comme la cité Radieuse à Marseille, La chapelle de Rochamp (Haute-Saône) ou le capitole de Chandigarh (Inde).
"Ce qui est intéressant, c'est de dérouler le fil de l'œuvre", souligne Jacques Sbriglio affirmant que le travail du plasticien est indissociable de celui de l'architecte.
Benoît Decron, le conservateur du musée aveyronnais, est très fier de pouvoir proposer l'une des grandes figures de la modernité architecturale, après les expositions temporaires consacrées à Picasso en 2016 et Calder en 2017.
"Un artiste total"
"C'est un artiste total", lance Benoît Decron en déambulant à travers les 500 m2 de l'exposition. A l'entrée, on découvre une immense photo de Le Corbusier en tenue de travail, chemise à carreaux et iconique lunette noire. Il dessine courbé sur son bureau.
Devant une série de toiles des années 20, le conservateur commente : "c'est une peinture assez sèche... ascétique". Les toiles sont signées de son vrai nom, Charles-Edouard Jeanneret-Gris, il n'est pas encore devenu Le Corbusier.
Il vient d'écrire un manifeste, "Après le cubisme", avec son ami le peintre Amédée Ozenfant. "Il joue avec des formes qu'il va utiliser dans son architecture. Il y a un rapport évident entre ce qu'il peint et ce qu'il va construire".
Face aux toiles, un panneau rassemble un patchwork de photos en noir et blanc, notamment la célèbre villa Savoye, dans les Yvelines, véritable manifeste du modernisme.
A partir de 1928, "Le Corbusier ramasse tout ce qu'il trouve, galets, cordes, bouts de bois", commente encore M. Decron, devant des toiles de la seconde période, dite des "objets à réactions poétiques".
"Ce sont des toiles beaucoup plus poétiques, moins construite". L'historien d'art relève les couleurs plus vives, "par exemple dans la Nature morte au hachoir (1928) les galets sont orange, bleu, vert".
Puis il désigne les évolutions similaires des bâtiment de l'époque : la villa le Sextant (Charente-Maritime) construite en pierre, les murs courbes de la fondation Suisse à Paris.
Un peu plus loin, deux immenses tapisseries introduisent à la période "Brutaliste". "Il y a une parenté avec Miro ou les découpage de Matisse. Le dessin est dominé, les personnages sont dessinés d'un seul geste".
Ce travail épuré se retrouve logiquement dans les édifices des années 40 à 60 : le béton brut de décoffrage de la cité Radieuse (Marseille), le voile majestueux de la toiture de la chapelle de Ronchamp qui reprend la forme des cornes du minotaure. L'animal mythologique dont il peint une série dans les années 50.
Loin de l'image du bétonneur qu'on lui a collé, Jacques Sbriglio souhaite que cette exposition révèle au public la face "humaniste" et la puissance créatrice du grand architecte.
("Le Corbusier, l'atelier de la recherche patiente, un métier", au Musée Soulages du 27 janvier au 20 mai)
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