Moins d'une heure après la reprise du procès, la présidente de la 16e chambre a dû suspendre l'audience après des échanges très vifs entre le prévenu, jugé pour "recel de malfaiteurs terroristes", et un avocat de la partie civile, Me Georges Holleaux.
"Attention à ce que vous dites. (...) Moi je vais venir vous voir à votre cabinet", a menacé Jawad Bendaoud très énervé. "M. Bendaoud, taisez-vous!", est intervenue la présidente Isabelle Prévost-Desprez.
Ces échanges ont donné le ton de la suite de l'audience, au troisième jour du procès du logeur présumé de deux jihadistes du 13-Novembre. Le procès a pris parfois des allures de one-man-show, totalement décalé face à la gravité du sujet.
A la reprise de l'audience, Jawad Bendaoud a présenté ses excuses. "Ça fait quatorze mois que je ne suis pas sorti de ma cellule", a-t-il tenté de justifier. "A ma place, il y a des gens, ils se seraient coupé les testicules".
Énervé par Me Holleaux et ses confrères, Jawad Bendaoud a demandé plusieurs fois le droit au silence en se bouchant ostensiblement les oreilles... Et avant de se lancer dans de longues logorrhées. Ses avocats, Xavier Nogueras et Marie-Pompéi Cullin, ont tenté de le calmer plusieurs fois, mais rarement avec succès.
Un avocat se lève. "Monsieur Reinhart? C'est même pas la peine", lui lance le prévenu, rechignant à répondre à ses questions, comme à celles d'autres avocats qui le "provoquent sur BFM". Le détenu explique qu'il regarde sans cesse les chaînes d'information depuis sa prison. "Je ne peux pas parler avec des gens qui me lynchent à la télé".
"Exercez votre droit au silence. En vrai, M. Bendaoud", le prie la présidente. En vain.
"De la glace dans les veines"
"Vous êtes atteint psychologiquement", "Comment vous avez le culot de porter cette robe?", lâche encore le prévenu aux avocats.
Sur le fond, il a répété qu'il ne savait pas qu'il logeait des jihadistes: "Il y a des signes que j'ai mal interprétés", a redit le prévenu. Abdelhamid Abaaoud, le cerveau présumé des attentats? Jawad Bendaoud "le trouve louche mais pas terroriste".
"Je n'ai aucune information sur les attentats" après le 13 novembre, affirme-t-il. "Il faut vraiment avoir de la glace dans les veines pour accueillir un mec qui a tué 130 personnes", se défend le prévenu.
Jawad Bendaoud reconnaît avoir loué son squat à des mafieux d'Europe de l'Est, sans se demander ce qu'ils faisaient vraiment. "Pour les terroristes, vous ne vous posez pas plus de questions", lui reproche un avocat.
Jeudi, son complice présumé Mohamed Soumah avait présenté ses condoléances et ses excuses aux victimes, mais Jawad Bendaoud ne lui a pas emboité le pas. "Moi, ça me choque de voir des gens blessés venir et (...) dire que je suis le responsable. Madame, vous savez ce que c'est de vivre avec un mort sur la conscience (celle de son meilleur ami dans une rixe, ndlr) ? Vous pensez que je veux en rajouter 130 ?", questionne le prévenu.
Soudainement, Jawad Bendaoud s'inquiète pour son avenir. "Je suis fini, que je mente ou pas. Qui va m'embaucher dehors? J'avais un projet de point de vente de cocaïne. Qui va s'associer avec moi?", s'inquiète-t-il.
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