Les trois syndicats, Ufap-Unsa (majoritaire), FO et CGT-Pénitentiaire, ont appelé à poursuivre le mouvement de blocage des établissements pénitentiaires.
"Ma porte est toujours ouverte", a assuré sur LCI en fin de journée la ministre de la Justice Nicole Belloubet, rappelant que "la situation de l'administration pénitentiaire et des prisons ne date pas d'il y a six mois (mais) de plusieurs décennies".
Cette crise des prisons est l'une des plus importantes depuis 25 ans, et un défi pour le gouvernement: après les critiques des Républicains, reprochant à la garde des Sceaux de "ne pas prendre la mesure" de la "détresse" des surveillants, c'est de la gauche que sont venues les banderilles.
Emmanuel Macron "s'est pris les pieds dans le tapis", a estimé Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la France insoumise à l'Assemblée nationale, tandis que le député PS Luc Carvounas a qualifié Nicole Belloubet de "ministre techno" empreinte de "désinvolture".
Peu avant ces négociations avortées, le Premier ministre Edouard Philippe avait assuré devant les députés que le gouvernement était prêt à examiner des "mesures indemnitaires spécifiques et ciblées" en faveur du personnel pénitentiaire.
"On repart déçus et frustrés parce que sur toute notre plateforme, on n'a pas eu le dixième des réponses que l'on attendait", a déclaré le secrétaire général du syndicat Ufap-Unsa (majoritaire) Jean-François Forget, au lendemain d'une rencontre déjà infructueuse.
La prime proposée par la Chancellerie pour les agents affectés aux prisons sensibles a été qualifiée de "prime à l'agression" par les syndicats.
Une "prime d'attractivité et de fidélisation", des jours fériés et des dimanches mieux rémunérés ont également été mis sur la table pour une enveloppe globale de 30 millions d'euros. "La vie d'un surveillant ne vaut pas cher!", a tonné la CGT-Pénitentiaire, qui demande la nomination d'un médiateur pour remplacer une "ministre disqualifiée".
"Je ne suis pas absolument certaine qu'un médiateur s'impose à ce stade", a répondu Nicolas Belloubet, "décidée à gérer ce dossier".
Elle a par ailleurs qualifié d'"effort tout à fait considérable" la création de 1.100 postes sur quatre ans, un chiffre insuffisant selon les syndicats.
"Difficulté du métier"
"Le mouvement est plus dur qu'hier" (lundi), a reconnu la Direction de l'administration pénitentiaire (DAP). Au total, 122 établissements sur 188 se sont mobilisés. Le fonctionnement de 45 d'entre eux a été affecté, obligeant les forces de l'ordre à suppléer les surveillants.
Jean-François Forget, pour l'Ufap-Unsa, a même assuré sur BFMTV que les surveillants comptaient "bloquer" le transfert de Jawad Bendaoud de la prison de Fresnes pour son procès très attendu mercredi après-midi à Paris, pour avoir logé des jihadistes du 13 novembre 2015 à Saint-Denis. Une décision "absolument pas acceptable", selon Nicole Belloubet.
Du côté des détenus, le mouvement des gardiens provoque un "ras-le-bol", a indiqué l'administration. Certains ont refusé de remonter dans leurs cellules, notamment à Valence, Villefranche-sur-Saône, Metz, Laval et Varennes-le-Grand, obligeant le recours des équipes régionales d'intervention et de sécurité (Eris).
Depuis dimanche, une cellule spéciale a été mise en place pour évaluer la situation dans les prisons. Mardi matin, huit escadrons de gendarmes mobiles (640 hommes) ont été mobilisés pour remplacer certains surveillants ou encadrer les manifestations.
Les mobilisations ont touché toute la France, de la région parisienne (Poissy, Bois d'Arcy, Nanterre, Versailles) au Sud-Est (Marseille, Tarascon, Grasse, Béziers) en passant par l'Ouest (Nantes, Rennes, Le Havre, Rouen, Brest...), le Centre (Saint-Maur, Châteauroux, Bourges et Saran) et le Sud-Ouest (Gradignan et Bayonne), selon des sources syndicales et les correspondants de l'AFP.
Les 28.000 gardiens de prison jugent leur profession dangereuse, mal payée et mal considérée alors que les prisons souffrent d'une surpopulation chronique.
Après l'échec de premières négociations samedi, la ministre s'est personnellement investie pour éteindre cette mobilisation, déclenchée par l'agression de surveillants dans la prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) le 11 janvier et attisée, depuis, par une série d'autres incidents violents.
Deux surveillants ont été violemment mordus par un détenu et conduits à l'hôpital, mardi matin au centre pénitentiaire de Beauvais.
burs-ctx-alh/ct
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