Voilà une semaine qu'ils se préparaient à un assaut turc, alors qu'Ankara multipliait ses menaces contre les Unités de protection du peuple kurde (YPG), la milice qui contrôle la région.
"Mon fils de quatre ans est terrifié à chaque fois qu'il entend le bruit d'un avion", confie Nisrine, une femme au foyer d'Afrine qui a demandé à utiliser un pseudonyme. "Quel crime a-t-il commis pour vivre dans la terreur?"
Lorsque les bombardements ont commencé, Nisrine et ses proches se sont cachés à la hâte dans le sous-sol de leur immeuble, suivant les instructions des autorités kurdes.
"Nous avions préparé nos sous-sols pour protéger nos enfants, avec des aliments de base comme du lait ainsi que des médicaments pour les enfants et les personnes âgées", explique Nisrine.
La Turquie et ses alliés rebelles en Syrie ont lancé samedi une offensive terrestre et aérienne baptisée "Rameau d'olivier" pour chasser les YPG d'Afrine, une région à majorité kurde.
Selon un journaliste à Afrine collaborant avec l'AFP, les habitants ont rapidement déserté les rues lorsque les bombardements turcs ont débuté vers 16H30 (14H30 GMT), tandis que les YPG déployaient des véhicules militaires.
Les autorités locales ont imposé un couvre-feu, interdit aux civils tout rassemblement public et ordonné de fermer commerces et écoles.
'Guerre psychologique'
"Je ne sais pas comment décrire ce que j'ai ressenti lorsque les avions turcs ont survolé Afrine et bombardé les civils", a déclaré Randa Mustafa, une enseignante âgée d'une quarantaine d'années.
"Les enfants ont peur. Nos hommes, nos femmes et nos jeunes sont pacifiques, qu'ont-ils fait de mal?", se désole Randa.
Elle accuse la Turquie de vouloir semer la discorde parmi les Syriens et de mener une "guerre psychologique" contre les habitants d'Afrine.
Ankara considère les YPG comme la branche syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mène une rébellion dans le sud-est de la Turquie depuis plus de 30 ans.
La branche politique des YPG, le Parti de l'union démocratique (PYD), a affirmé samedi que les bombardements turcs avaient blessé 25 civils. De son côté, la Turquie a fait état de victimes, précisant qu'il s'agissait d'activistes kurdes.
"Nous avons pris des mesures pour protéger les civils, notamment en creusant des abris anti-bombes et des tunnels pour les utiliser en cas d'urgence", a assuré Heve Mustafa, un responsable du conseil municipal.
"Notre plus grande crainte, c'est que les forces internationales présentes sur le terrain en Syrie, qui prétendent être venues combattre le terrorisme et trouver une solution au problème syrien, ferment les yeux" sur l'offensive, souligne-t-il.
Plusieurs forces de puissances internationales sont déployées dans le nord de la Syrie, dont l'allié russe du régime et la coalition internationale antijihadistes menée par les Etats-Unis.
Mais la Russie a annoncé samedi que ses militaires avaient quitté la zone d'Afrine.
'La résistance, seule option'
"La seule option dont dispose l'administration autonome est la résistance. Rien d'autre. Nous ne permettrons pas une occupation turque du territoire syrien", ajoute M. Mustafa.
Dans un communiqué diffusé samedi, les YPG vont dans le même sens, avançant que les combattants kurdes n'ont "aucun choix", si ce n'est celui de se battre contre "l'agression barbare" de la Turquie.
En 2012, après le retrait des forces gouvernementales de la zone, Afrine est devenue la première région kurde en Syrie à échapper au contrôle du régime de Bachar al-Assad, créant notamment des écoles et des forces de sécurité.
Jamil, un ingénieur de 22 ans, se dit en colère du nom choisi par la Turquie pour désigner son offensive dans cette région réputée pour ses oliveraies.
"Erdogan l'a appelée +Opération rameau d'olivier+, précisément parce que c'est la ville des olives et de la paix", dit-il. "Mais avec ce nom, il nous montre qu'il ne veut ni la paix ni la sécurité."
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