D'une puissance relativement symbolique d'un mégawatt, la centrale se trouve à seulement une centaine de mètres du nouveau "sarcophage" en acier étanche qui recouvre les restes du réacteur accidenté de Tchernobyl, théâtre en 1986 du pire accident nucléaire de l'Histoire.
Une telle centrale peut couvrir la consommation d'environ 2.000 foyers vivant en appartements, explique à l'AFP Evguen Variaguine, directeur de l'entreprise ukraino-allemande Solar Chernobyl qui a réalisé ce projet.
Le groupe a dépensé un million d'euros dans cette structure d'environ 3.800 panneaux photovoltaïques installés sur 1,6 hectare, le double de la pelouse d'un stade de football. Il espère rentabiliser le projet d'ici à sept ans.
A partir de cette unité qui doit être inaugurée dans les semaines à venir, le groupe prévoit d'atteindre un total de 100 mégawatts dans la zone où le niveau d'ensoleillement "est le même que dans le sud de l'Allemagne", souligne M. Variaguine.
L'Ukraine cherche à développer sa propre production d'énergie après l'arrêt brutal de ses achats de gaz russe en pleines tensions entre Moscou et Kiev. Elle veut aussi redonner une seconde vie à la zone d'exclusion de Tchernobyl qui entoure dans un rayon de 30 kilomètres la centrale nucléaire accidentée, à une centaine de kilomètres au nord de Kiev, près de la frontière bélarusse.
Terre contaminée
Le réacteur numéro 4 de la centrale de Tchernobyl a explosé le 26 avril 1986 contaminant, selon certaines estimations, jusqu'aux trois quarts de l'Europe.
Après cette catastrophe, les autorités soviétiques ont évacué des centaines de milliers de personnes et un vaste territoire, couvrant plus de 2.000 kilomètres carrés, est resté abandonné.
Trois autres réacteurs de la centrale ont continué de fonctionner après le drame mais le dernier a été fermé en 2000, marquant la fin de toute activité industrielle à Tchernobyl.
L'Homme ne pourra pas revenir vivre dans cette zone "pendant encore 24.000 ans" mais une prudente exploitation industrielle redevient possible, estiment les autorités ukrainiennes.
"Ce territoire ne peut évidemment pas être utilisé pour l'agriculture, mais il convient tout à fait pour des projets innovants et scientifiques", assurait à l'AFP en 2016 le ministre ukrainien de l'Environnement Ostap Semerak.
L'installation fin 2016 d'une gigantesque chape étanche au-dessus des ruines du réacteur accidenté a contribué à la réalisation du projet.
Financé par la communauté internationale, le nouveau dôme a recouvert le vieux "sarcophage" en béton, fissuré et instable, et permis de mieux isoler le magma hautement radioactif resté dans le réacteur. Résultat: le taux de radioactivité à proximité de la centrale a été divisé par dix en un an, selon les estimations officielles.
Des précautions restent nécessaires: les supports des panneaux photovoltaïques de Solar Chernobyl ne sont pas plantés directement dans la terre contaminée, mais fixés sur des socles en béton posés à même le sol.
"Nous ne pouvons pas forer ou creuser ici en raison des règles de sécurité", explique M. Variaguine.
Corruption et sécurité
Le consortium qui l'emploie a déjà construit en 2016 une centrale solaire d'un peu plus de quatre mégawatts dans la zone irradiée au Bélarus voisin, à plusieurs dizaines de kilomètres de Tchernobyl.
Côté ukrainien, les autorités ont mis à disposition près de 2.500 hectares pour de tels projets. Elles ont déjà reçu une soixantaine de propositions de la part de groupes étrangers --danois, américains, chinois, français-- , selon Olena Kovaltchouk, porte-parole de l'administration locale.
Facteur encourageant, Kiev achète l'énergie solaire à un tarif qui "dépasse en moyenne de 50% celui appliqué en Europe", explique à l'AFP Oleksandr Khartchenko, directeur exécutif du Centre des recherches énergétiques de Kiev.
La ruée des investisseurs occidentaux vers Tchernobyl n'est cependant pas pour demain, prévient cet expert, vu le poids de la bureaucratie et de la corruption endémiques en Ukraine.
"Il est très important d'avoir des garanties que le travail dans la zone de Tchernobyl sera sûr", prévient de son côté Anton Oussov, conseiller de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd), qui ne prévoit pour l'instant aucun investissement dans ce domaine en Ukraine.
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