Des jeunes sont descendus dans la rue par centaines à Tebourba, à 30 km à l'ouest de Tunis, où des policiers et de militaire déployés en force ont répliqué à des jets de pierre à coups de gaz lacrymogènes, a constaté un journaliste de l'AFP.
Des scènes similaires ont eu lieu dans le centre défavorisé du pays, à Kasserine et à Jelma, localité proche de Sidi Bouzid d'où était partie en décembre 2010 la contestation sociale marquant le début des Printemps arabes.
Une autopsie avait lieu mardi pour déterminer la cause du décès d'un homme de 45 ans à Tebourba dans des circonstances peu claires lors de heurts dans la nuit de lundi à mardi, selon les ministères de la Santé et de l'Intérieur.
Le ministère de l'Intérieur a démenti que cet homme a été tué par la police, soulignant qu'il ne portait aucune marque de violence. Il souffrait de "problèmes respiratoires", a indiqué le porte-parole du ministère.
Lundi soir, "nous n'avons pas vu des protestations mais des gens qui cassent, volent et agressent les Tunisiens", a affirmé le Premier ministre tunisien Youssef Chahed sur les ondes de la radio privée Mosaïque FM.
"Nous disons aux casseurs et à ceux qui les incitent que, pour le gouvernement, la seule solution est d'appliquer la loi. (Nous sommes) prêts à écouter mais chaque personne voulant manifester doit le faire de manière pacifique", a-t-il prévenu.
"Citoyen opprimé"
Ces incidents interviennent au moment où la grogne sociale monte en Tunisie, notamment contre la hausse de la TVA entrée en vigueur au 1er janvier dans le cadre d'un budget d'austérité.
Une manifestation à l'appel de plusieurs organisations de la société civile a rassemblé sans incident une centaine de personnes mardi dans le centre de la capitale Tunis.
"La pauvreté et la faim ont augmenté, oh citoyen opprimé!", scandaient les manifestants, en majorité des jeunes, a constaté l'AFP.
"Nos revendications sont les suivantes: suspendre la loi de finances 2018, revenir aux prix initiaux des denrées et embaucher une personne de chaque famille pauvre", a assuré Hamza Nasri, membre de la campagne "Fech Nestannew" (Qu'est-ce qu'on attend, ndlr) lancée en début d'année pour protester contre les hausses de prix.
Plusieurs centaines d'autres personnes, pour beaucoup très jeunes, ont également manifesté à Regueb, dans le centre défavorisé du pays, a constaté un correspondant de l'AFP.
Le ministre des Finances Ridha Chalghoum a assuré que le gouvernement garderait le cap des augmentations d'impôts.
"Le chef du gouvernement s'est engagé à ne pas augmenter les produits de première nécessité", a-t-il assuré à l'AFP. "Parmi les acquis de la démocratie il y a la possibilité de manifester, mais on a aussi l'obligation de travailler pour une économie tunisienne saine où cette croissance, qui a pointé le bout du nez en 2017, se consolide davantage et soit créatrice d'emplois".
'Violation de la loi'
Lors des incidents qui ont éclaté dans plusieurs villes dans la nuit de lundi à mardi, onze agents de police ont été blessés et au moins 44 personnes arrêtées, dont 16 à Kasserine, et 18 dans des quartiers populaires près de Tunis, a indiqué le ministère de l'Intérieur.
Des bâtiments publics ont été endommagés et des routes coupées.
"Ce qui s'est passé hier constitue une violation de la loi puisque l'état d'urgence est déclaré en Tunisie", a affirmé Khlifa Chibani, porte-parole du ministère de l'Intérieur. Le pays a instauré l'état d'urgence il y a plus de deux ans après une série d'attentats jihadistes sanglants.
Le mois de janvier est traditionnellement marqué par une mobilisation sociale en Tunisie depuis la révolution de 2011, et le contexte est particulièrement tendu cette année à l'approche des premières élections municipales de l'après-révolution, plusieurs fois reportées et prévues en mai.
En janvier 2016, lors de la dernière importante vague de contestation sociale en date, la colère déclenchée par le décès d'un chômeur protestant à Kasserine s'était propagée à travers le pays, qui avait du décréter un couvre-feu des jours durant.
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