Après plusieurs jours de troubles dans le pays, la capitale Téhéran et la plupart des villes de province ont passé une deuxième nuit calme. Les médias et les réseaux sociaux n'ont fait état d'aucune manifestation nocturne, même si des vidéos de rassemblements sporadiques dans des petites localités ont été publiées, sans vérification possible.
Jeudi matin, la télévision iranienne a diffusé des images de nouvelles manifestations importantes en soutien au pouvoir dans les villes d'Ispahan (centre), Machhad (nord-est), Oroumieh (nord-ouest), Babol ou encore Ardebil (nord).
"Nous sommes tous ensemble, derrière le guide", l'ayatollah Ali Khamenei, scandaient ces manifestants, selon les images de la TV d'Etat.
Les manifestants ont aussi repris les slogans "mort à l'Amérique", "mort à Israël" ou "mort à monafegh", (hypocrite en persan), un terme qui désigne dans la bouche des autorités les Moudjahidine du peuple, principal groupe d'opposition en exil, interdit en Iran.
Déjà, mercredi, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté dans une vingtaine d'autres villes de province pour soutenir le pouvoir et dénoncer les violences.
Les autorités accusent les "groupes contre-révolutionnaires" et les Moudjahidine du peuple d'avoir profité des manifestations "légitimes" de la population contre les difficultés économiques pour créer des troubles.
L'armée d'élite du pouvoir, les Gardiens de la révolution, a proclamé mercredi la fin de ce mouvement qualifié de "sédition". Parti le 28 décembre de Machhad (nord-est), la deuxième ville du pays, cette contestation inédite depuis 2009 a secoué l'Iran.
De jeudi à lundi soir, 21 personnes ont péri -en majorité des manifestants- et des centaines ont été arrêtées, dont 450 à Téhéran, selon des chiffres officiels.
"Ingérences" américaines
Téhéran a aussi accusé les Etats-Unis et l'Arabie saoudite, grande rivale régionale, d'avoir attisé les troubles en soutenant les manifestations violentes. L'Iran s'est plaint auprès du Conseil de sécurité et du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, "d'ingérence" dans ses affaires intérieures.
"Au cours des derniers jours, l'administration américaine (...) a augmenté ses interventions d'une manière grotesque dans les affaires intérieures de l'Iran sous prétexte de fournir un soutien à des manifestations sporadiques", a affirmé le représentant à l'ONU, Gholamali Khoshroo.
Depuis le début de la contestation, Donald Trump a pris fait et cause pour les protestataires et a condamné le régime. L'ambassadrice américaine à l'ONU, Nikki Haley, a demandé des réunions d'urgence du Conseil de sécurité et de celui des droits de l'Homme.
Un haut responsable de l'administration américaine a affirmé que de nouvelles sanctions pourraient être prises contre Téhéran pour des "infractions" aux droits de l'Homme, des actes de censure ou l'entrave à la liberté de rassemblement.
"Problèmes économiques"
La classe politique en Iran -réformateurs comme conservateurs- s'est elle positionnée contre les violences, tout en soulignant la nécessité de trouver une solution aux problèmes économiques, principalement le chômage, qui atteint 30% chez les jeunes.
Si les griefs économiques ont largement contribué à donner naissance à ces mouvements de contestation, des revendications politiques ont aussi rapidement émergé.
"La principale demande des gens aux responsables et au gouvernement est qu'ils règlent les problèmes économiques", a toutefois avancé mercredi soir Ali Akbar Velayati, conseiller du guide suprême pour les affaires internationales, cité par l'agence Isna.
"Il faut le faire avec des mesures de la part du gouvernement et du parlement, en évitant les divisions", a-t-il poursuivi.
Réélu en mai dernier, le réformateur Hassan Rohani avait promis dès son accession à la présidence en 2013 d'oeuvrer à l'amélioration de la situation économique et sociale, un espoir amplifié par l'accord sur le nucléaire iranien signé en 2015, et la levée de certaines sanctions internationales.
Mais le renchérissement du coût de la vie, et le chômage, n'ont pas apaisé les frustrations.
Le parlement, qui examine le budget pour la prochaine année fiscale (mars 2018-mars 2019), a d'ores et déjà rejeté des augmentations que le gouvernement voulait appliquer, notamment une hausse de 50% du prix de l'essence, mesure qui selon des experts aurait renforcé une inflation atteignant déjà 10%.
"Il faut absolument prendre en compte la situation de la population (...) Un bond du prix de l'essence n'est absolument pas dans l'intérêt du pays, il y a d'autres méthodes (...) pour que les couches populaires ne subissent pas de pressions" supplémentaires, a également argué il y a trois jours le président du Parlement, le conservateur Ali Larijani.
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