L'Iran est le théâtre depuis une semaine de violentes protestations contre les difficultés économiques et le régime. Au total, 21 personnes ont été tuées dans des violences liées à ces rassemblements. Des centaines d'autres ont été arrêtées.
Depuis le début des troubles, le locataire de la Maison Blanche, qui considère Téhéran comme son ennemi numéro un au Moyen-Orient, multiplie les attaques contre un régime qualifié de "brutal et corrompu" et a promis mercredi le soutien américain au peuple iranien "le moment venu".
Engagée dans une normalisation de ses rapports avec Téhéran depuis la conclusion en 2015 de l'accord sur le nucléaire iranien, l'Union européenne se montre elle bien moins vindicative, en choisissant d'insister sur le respect des droits de l'Homme.
La cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a déploré mardi "la perte inacceptable de vie humaines" et appelé "toutes les parties concernées" à s'abstenir "de toute violence".
Le même jour, le président français Emmanuel Macron confiait à son homologue iranien Hassan Rohani sa "préoccupation" face "au nombre de victimes, en l'exhortant à "la retenue et à l'apaisement". La visite prévue dans les prochains jours à Téhéran du chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a été reportée.
"Le Royaume-Uni observe attentivement les événements en Iran", a pudiquement commenté le ministre des Affaires étrangères britannique Boris Johnson, tandis que Berlin a appelé Téhéran à "respecter la liberté de rassemblement et d'expression" en encourageant le régime à répondre "par le dialogue".
Pour François Nicoullaud, ancien ambassadeur de France en Iran, "la position européenne est certes peut-être moins avantageuse devant nos opinions publiques, mais relève de la sagesse" au vu selon lui des faibles espoirs de voir aboutir de cette révolte populaire.
'Huile sur le feu'
"Ce qui se passe en Iran est l'expression d'une souffrance profonde mais telle qu'elle s'exprime, sans cadre, sans programme, ses chances de succès sont très modérées. Dans un affrontement dur avec le régime elle sera forcément écrasée", juge ce spécialiste des relations internationales.
"Avant les sanctions économiques contre l'Iran, l'UE était le premier partenaire commercial de ce pays. Et sur le plan diplomatique, l'Iran est un acteur central dans de multiples crises régionales. Tout ceci concourt à l'idée, en Europe, qu'il faut entretenir des relations normalisées avec Téhéran. Les réactions européennes doivent être replacées dans ce contexte", analyse de son côté Thierry Coville, spécialiste de l'Iran au sein du groupe de réflexion français IRIS.
"L'UE se montre sage, estime-t-il. Ce qui compte, c'est la société civile iranienne, or la meilleure façon de les soutenir c'est de viser l'amélioration économique, pas de jeter de l'huile sur le feu. Car dans cette crise, les modérés iraniens ont beaucoup à perdre et les radicaux beaucoup à gagner".
"L'Occident et surtout le président Donald Trump seraient mal avisés de soutenir les contestataires, car cette posture risquerait de faire le jeu des +faucons+", renchérissait lundi le journal britannique The Times. "Le mieux à faire est de temporiser et de laisser ce régime vicié révéler sa propre nature".
Washington risque malgré tout de camper sur ses positions, à l'heure où "Trump doit décider de dénoncer ou non l'accord sur le nucléaire iranien autour du 15 janvier", rappelle Denis Bauchard, chercheur à l'Institut français des relations internationales (IFRI).
Face à la remise en cause par M. Trump de cet accord, les Européens au premier rang desquels la France défendent l'application de ce texte présenté par ses partisans comme le meilleur moyen d'éviter que l'Iran ne se dote de l'arme atomique.
Même si Emmanuel Macron a semblé à plusieurs reprises se rapprocher de la position américaine en demandant l'ouverture d'un dialogue avec l'Iran sur son programme de missiles et ses actions extérieures, notamment en Syrie et en Irak.
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