La télévision d'Etat diffusait en boucle samedi des images de ces manifestations officielles organisées dans de nombreuses villes du pays et prévues depuis plusieurs semaines.
Elles marquent en effet l'anniversaire du grand rassemblement prorégime qui avait sonné la fin du mouvement de protestation contre la réélection de l'ex-président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad en 2009.
Les manifestants portaient notamment des pancartes avec des inscriptions "Mort à la sédition", en référence au mouvement de 2009.
Ces rassemblements officiels interviennent après deux jours de manifestations contre l'inflation et le chômage dans une dizaine de villes iraniennes, durant lesquelles certains protestataires ont scandé des slogans hostiles au pouvoir.
Samedi, les médias iraniens évoquaient ces protestations mais sans rentrer dans le détail ni publier des témoignages.
Le nombre des protestataires est resté limité à plusieurs centaines mais c'est la première fois depuis 2009 qu'autant de villes ont été touchées par de telles protestations sociales.
Elles avaient commencé jeudi à Machhad, deuxième ville du pays, où une cinquantaine de manifestants ont été arrêtés. Ces arrestations ont été fermement condamnées par l'administration américaine, qui a fait de Téhéran une de ses bêtes noires.
"Le gouvernement iranien devrait respecter leurs droits, notamment leur droit de s'exprimer. Le monde regarde", a tweeté le président américain Donald Trump au sujet des protestataires, avec le hashtag #IranProtests.
'Signal d'alarme'
Des vidéos mises en ligne sur les réseaux sociaux ont montré des personnes manifestant vendredi dans la ville sainte de Qom (nord) en scandant notamment "Mort au dictateur" ou encore "Libérez les prisonniers politiques".
Certains manifestants ont même scandé des slogans en faveur de la monarchie, renversée par la révolution islamique en 1979. D'autres ont demandé au régime d'abandonner son soutien à des mouvements régionaux alliés pour s'occuper de sa population.
Sur Telegram ou Instagram, réseaux sociaux largement utilisés en Iran, on pouvait voir des vidéos de manifestants dans les villes de Rasht (nord), Kermanshah (ouest), Hamedan (ouest) ou Qazvin (nord).
La police est intervenue dans certaines villes, notamment avec des canons à eau. Ailleurs, des officiers de police tentaient de calmer les gens.
Samedi, le quotidien réformateur Arman titrait en Une "Signal d'alarme pour tout le monde" alors que les appels se multipliaient pour appeler le gouvernement à prendre des mesures afin de régler les maux économiques du pays.
Le quotidien conservateur Javan parlait de "mouvement social" et reprenait une phrase du président Hassan Rohani affirmant que "les ennemis (de l'Iran) visaient le soutien populaire au régime" et cherchaient à créer des "divisions" entre les Iraniens.
Des voix se sont également élevées dans le camp conservateur pour dénoncer l'utilisation des protestations des deux derniers jours par des "contre-révolutionnaires".
'Totale surprise'
La promesse de relancer l'économie, affaiblie par des sanctions internationales, a été au coeur des campagnes présidentielles de M. Rohani, un religieux modéré réélu en mai pour un deuxième mandat.
S'il a pu parvenir à la levée de certaines sanctions économiques après l'accord international sur le nucléaire iranien de 2015 et qu'il a réussi à maîtriser l'inflation à environ 10%, le taux de chômage demeure élevé (12%) en Iran selon des chiffres officiels.
"C'est difficile de prédire si ces protestations vont continuer car elles ont été une totale surprise", a déclaré à l'AFP Payam Parhiz, le rédacteur en chef de la plate-forme Nazar (réformateur), présente sur des réseaux sociaux.
Hesamoddin Ashna, conseiller culturel du président Rohani, a estimé sur Twitter que "le pays faisait face à des défis importants avec le chômage, l'inflation, la corruption, le manque d'eau et les disparités sociales".
"Les gens ont le droit d'être entendu", a-t-il ajouté.
Des conservateurs ont de leur côté appelé le gouvernement à mieux s'occuper des problèmes quotidiens des Iraniens.
"Le peuple, en particulier les petites gens, est sous pression. Le règlement des problèmes économiques est la priorité du pays", a indiqué Ebrahim Raissi, candidat conservateur à la présidentielle battu par Hassan Rohani en mai.
"Si les membres du gouvernement montrent de la détermination à régler les problèmes économiques, le peuple les soutiendra", a-t-il assuré.
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