Dans le gymnase de la prison, décoré de guirlandes et de ballons, les prisonniers - hommes et femmes- accueillent leurs "invités". Les enfants approchent lentement, souvent intimidés par les différents sas de sécurité qu'ils ont dû traverser. Les conjoints des détenus et détenues n'ont pas été conviés.
Pour Nicolas comme pour les autres détenus, le spectacle de magie, la venue du Père Noël et la distribution de cadeaux - offerts par l'administration pénitentiaire - c'est avant tout "un moment passé avec nos enfants hors du temps, du temps carcéral". Depuis qu'il est né, le fils de Nicolas, 7 ans, n'a vu son père, condamné à 15 ans de réclusion, que derrière les barreaux.
Maëva, 14 ans, boude: "je n'ai pas aimé passer les portes de la prison, c'est triste". La collégienne aux longs cheveux bruns vit en foyer depuis le placement en détention de sa mère, Véronique, il y a 18 mois.
Les hommes sont en survêtement, cheveux gominés, et la plupart des femmes maquillées, comme Véronique qui a fardé ses paupières de rose foncé. Elle attendait ce jour avec impatience: "je n'ai plus de parloir depuis trois mois, je trépignais !" Véronique présente sa fille, sa "raison de tenir", à des surveillantes tout sourire.
"Le temps d'un après-midi, qu'on soit personnel ou détenu, les barrières tombent", commente Frédérique Cianelli, officier en charge de la politique d'insertion et de prévention de la récidive.
D'autres barrières tombent aussi, entre sexes. "Avant c'était une hérésie de mélanger les hommes et les femmes comme ça, on n'y aurait même pas pensé, mais c'est très important sur le plan humain", assure Frédérique Cianelli, qui rappelle que la loi pénitentiaire "le permet".
Les femmes bien plus seules
La mixité en prison, le temps d'une activité ou d'une sortie, est surtout bénéfique aux femmes, selon elle: "les détenues sont bien plus esseulées, déjà parce qu'elles sont en général condamnées à de plus grosses peines, et aussi parce qu'elles n'ont aucun contact avec les hommes au quotidien". Les détenus hommes, eux, côtoient du personnel féminin.
"On essaie de mélanger hommes et femmes de plus en plus", confirme Guillaume Piney, le directeur des Baumettes dont le quartier féminin compte une centaine de personnes, "notamment lors d'ateliers d'apprentissage du français en petits groupes".
Ce mercredi après-midi, hommes et femmes, dont certains se sont côtoyés quelques jours plus tôt pour le Téléthon, se saluent du regard, mais se parlent peu. L'objet de leur attention à tous, ce sont les enfants.
Une détenue est déçue que sa fille de 10 ans refuse la photo avec le Père Noël: "je la vois jamais et elle fait pas d'effort", glisse-t-elle à une co-détenue.
Un papa, lui, est ému au larmes: "je vois mon fils content, qui rit, c'est rare quand on est en prison". Il remercie Florence Duborper, la directrice du Relais Enfants-Parents Paca, qui accompagne les enfants de prisonniers lors des visites à leurs parents. Cette dernière jubile: "ce Noël c'est beau, c'est fort, on sent que ça fait du bien à tout le monde".
Pendant le spectacle, sur leurs chaises, parents et enfants se rapprochent doucement, se touchant les mains ou les cheveux. A la fin de la représentation, un jeune père, grand sourire aux lèvres, disparaît derrière ses quatre petits qui ont grimpé ensemble sur ses genoux.
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