RT France a émis ses premiers journaux en français à partir de 19H00 sur le canal 359 du bouquet Free, sur le câble, le satellite et sur son site internet.
Quelques heures plus tôt, dans la journée de lundi, les 80 journalistes de la chaîne et du site s'activaient au siège flambant neuf de RT France, installé entre la tour TF1 et les bâtiments de Canal+ à Boulogne-Billancourt.
Financée par la Russie, la chaîne est une déclinaison en français de RT (ex-Russia Today), qui émet déjà en anglais, espagnol et arabe. Lancée avec les moyens d'une petite chaîne d'info (20 millions d'euros et 150 salariés), elle doit permettre au groupe russe de toucher un public encore plus large, soit 275 millions de francophones.
RT est déjà présent en France depuis 2015 avec un site internet et se montre très actif sur YouTube où ses vidéos, doublées ou sous-titrées, rencontrent un franc succès. Désormais, RT diffusera chaque heure un grand JT d'une demi-heure, suivi de reportages, d'entretiens et d'émissions sur l'actualité, rediffusées en ligne.
'Prêts à répondre'
Dès l'annonce de son lancement en français, la chaîne a éveillé les soupçons. RT et Sputnik, autre média russe considéré comme proche du Kremlin, ont été accusés par le président Emmanuel Macron de s'être comportés durant la campagne présidentielle française "comme des organes d'influence (...) et de propagande mensongère".
"Nous sommes accusés mais il n'y a aucune preuve. Nous sommes prêts à répondre à toutes les accusations", a affirmé lundi la présidente de la chaîne Xenia Fedorova, 36 ans, qui gérait auparavant l'agence de vidéo du groupe RT, Ruptly. Il n'y aura par ailleurs "pas d'attention particulière à l'actualité russe: nous faisons nos choix en fonction de l'actualité", a souligné, en anglais, la présidente de la chaîne à l'AFP.
Au Royaume-Uni, le régulateur de l'audiovisuel (Ofcom) a déjà émis 14 mises en demeure contre RT et l'a menacée de sanction, pour des sujets notamment sur la Syrie et l'Ukraine, où l'armée russe est présente.
Aux Etats-Unis, les autorités ont forcé la chaîne à s'enregistrer comme "agent de l'étranger". La Russie a aussitôt riposté en enregistrant en tant qu'"agents de l'étranger" des radios financées par le Congrès américain.
Si la chaîne est sous le feu des critiques, c'est parce qu'elle "donne de la place à des opinions différentes", selon Xenia Fedorova.
Le soupçon qui pèse sur la chaîne empêche ses journalistes de travailler, selon la direction de la chaîne. Ils n'arriveraient pas à s'accréditer à certains événements politiques, dont les conférences de presse de l'Elysée, et certains interlocuteurs refuseraient les interviews, "sous la pression du Quai d'Orsay", selon la dirigeante.
Sous l'oeil du CSA
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a fait savoir en novembre, par la voix de son président Olivier Schrameck, qu'il observerait "constamment" les programmes de RT et agirait avec "promptitude" en cas d'"anomalies". RT a signé dès 2015 avec le CSA une convention qui lui impose des engagements renforcés en matière "d'honnêteté et d'indépendance de l'information".
La chaîne dispose d'un comité d'éthique, renouvelé après le retrait de l'académicienne Hélène Carrère d'Encausse. Le comité compte désormais cinq membres dont les noms seront publiés prochainement.
De nombreux jeunes journalistes français ont rejoint la chaîne pour son lancement, mais aussi quelques professionnels plus chevronnés comme le directeur adjoint de l'information Jean-Maurice Potier, un ancien de France 3 et LCI, ou le rédacteur en chef Jérôme Bonnet (ex-Siné Hebdo et Echo des savanes).
Le journaliste Jean-Marc Sylvestre (ancien de TF1, LCI et iTélé) et l'économiste Jacques Sapir, connu pour ses positions hostiles à l'euro, vont animer de leur côté un débat hebdomadaire sur RT.
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