"Quand on compare le ton furieux de L'Emission Politique contre JLMelenchon et le ton mielleux de l'itw de Macron... On s'interroge : Est-ce bien raisonnable ?", a fustigé sur Twitter Alexis Corbière, député de La France insoumise.
Pour le socialiste François Kalfon, il flottait comme un "petit parfum d'ORTF", l'ancêtre du groupe France Télévision qu'Emmanuel Macron entend réformer dans les prochains mois.
A droite, Gilles Platret, un des porte-parole de Les Républicains a dénoncé "un week-end de communication" ainsi qu'une interview "peut-être un peu trop servie par des questions qui n'ont pas été des plus aiguës ou des plus acérées".
Cet entretien était carrément une "honte" pour le porte-parole du Front national, Sebastien Chenu : "Emmanuel Macron disait que le service public de l'audiovisuel était une honte. L'itw de Laurent Delahousse en était une sacrée".
L'émission a rassemblé moins de six millions de téléspectateurs, 25% de moins que le 20h de TF1 : "ce mauvais résultat s'explique par le fait que c'est davantage de politique étrangère qu'il a été question, ce qui intéresse moins les français", estime Arnaud Mercier, professeur en communication politique à l'Université Paris II.
Beaucoup plus tendu, le premier grand entretien télévisé du quinquennat, le 15 octobre sur TF1, avait rassemblé près de dix millions de téléspectateurs.
"sans mise en danger"
L'interview enregistrée mardi 12 décembre se voulait en rupture avec les standards télévisuels : "c'était quelque chose de très novateur dans sa forme, mais qui reste un exercice très convenu sur le fond : une conversation sans mise en danger ou déstabilisation", pour Marlène Coulomb-Gully, professeur de communication à l'Université de Toulouse-Jean Jaurès.
"Il y a un profond décalage entre le fond et la forme", pointe Arnaud Mercier : "la forme se voulait une façon de renouveler l'exercice alors que les questions et la manière de mener la discussion étaient quant à elles très convenues".
"C'est un retour en arrière assez consternant", s'emporte auprès de l'AFP l'historien des médias Alexis Lévrier. "On est revenus à l'ORTF, voire à la presse d'Ancien régime. Peu d'interruptions, des moues d'approbation du journaliste. C'était consternant qu'il n'y ait pas de contradiction. C'est aux journalistes de jouer leur rôle", affirme-t-il.
"Dans un contexte de raréfaction de la parole présidentielle, les chaînes de télévision vont se battre pour accepter les conditions que (l'Elysée) fixera, mais il y a un vrai enjeu de crédibilité pour elles", ajoute M. Lévrier, pour qui "le président est dans sa logique. Le problème, c'est le dispositif journalistique qui est en face".
Contrairement à son prédécesseur, Emmanuel Macron limite ses contacts avec les médias nationaux, préférant s'exprimer sur les réseaux sociaux, voire des chaînes internationales, comme CNN en septembre.
Mais pour Arnaud Mercier, le chef de l'Etat "a compris que les réseaux sociaux ne suffisaient pas pour s'adresser aux Français. Il est rattrapé par la réalité qui est que pour toucher un maximum de Français, il a besoin des médias car avec les réseaux sociaux, on ne s'adresse qu'à un cercle restreint de gens qui nous sont plutôt favorables".
A l'attention France 2 qui a fourni une réalisation très soignée, avec des plans étudiés jusqu'à fournir des images en miroir, les critiques ont été impitoyables.
"C'est une erreur de communication majeure de la part de France Télévisions : ça donne l'impression d'une reprise en main de l'audiovisuel public", pour M. Lévrier.
"On reste en attente de quelque chose de plus incisif (...) Ce sont les causeries au coin du feu qu'on a connues au XXe siècle", égratigne Marlène Coulomb-Gully.
Mais "l'idée d'un questionnement incisif n'est pas du tout dans les mœurs professionnelles, cela fait même partie de la culture professionnelle du journalisme politique français", estime Arnaud Mercier.
Le correspondant anglophone de Reuters à l'Elysée, Michel Rose, était accablé sur Twitter : on a vu "le pire du journalisme de déférence à la française", écrit-il.
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