Après une décennie de révélations, le gouvernement australien avait finalement cédé en 2012 aux pressions et créé une Commission d'enquête royale sur les réponses institutionnelles aux crimes pédophiles.
Depuis 2013, elle a été contactée par plus de 15.000 personnes disant avoir été victimes de tels actes impliquant l'Eglise, des orphelinats, des clubs de sports, des écoles ou des organisations de jeunesse.
Plus de 4.000 institutions ont été mises en cause -dont de nombreuses entités catholiques- dans ces témoignages souvent très éprouvants lors d'auditions publiques ou à huis clos.
"Des dizaines de milliers d'enfants ont été victimes d'agressions sexuelles dans de nombreuses institutions australiennes. Nous n'en connaîtrons jamais le chiffre exact", indique vendredi dans son rapport final la Commission, qui fait des centaines de recommandations pour améliorer la sécurité des enfants et tenter d'empêcher les pédophiles d'agir.
"Quel que soit le nombre, c'est une tragédie nationale, perpétrée pendant des générations dans nombre d'institutions de confiance".
La Commission explique que des abus ont été commis dans presque tous les endroits où des enfants résidaient ou participaient à des activités éducatives, récréatives, sportives, religieuses ou culturelles.
'Difficile à comprendre'
Il ne s'agissait pas de quelques "pommes pourries", relève-t-elle. "Certaines institutions avaient de nombreux pédophiles qui agressaient de nombreux enfants".
"Les plus grandes institutions ont gravement manqué à leurs devoirs. Dans de nombreux cas, ces manquements ont été aggravés par une réponse manifestement inadaptée aux victimes".
"Le problème est tellement répandu, et la nature des crimes tellement odieuse, qu'il est difficile de le comprendre".
Plus de 2.500 signalements ont été faits à la police, et 230 enquêtes ouvertes.
Parmi les recommandations faites dans les 17 volumes du rapport, figure notamment l'obligation pour les prêtres de dénoncer les actes pédophiles qui leurs sont avoués dans le secret du confessionnal.
L'archevêque de Melbourne Denis Hart, président de la Conférence des évêques australiens, a présenté les excuses de l'Eglise pour son passé "honteux".
Mais, interrogé sur ce qu'il ferait s'il entendait en confession un homme reconnaître des actes pédophiles, M. Hart a dit qu'il ne violerait pas le secret de la confession.
"J'essaierais d'emmener cette personne en dehors du confessionnal, mais je ne briserais pas le secret", a-t-il dit lors d'une conférence de presse. "La sanction pour un prêtre violant le secret est l'excommunication".
Sept pour cent des religieux
Il a cependant ajouté qu'il lui refuserait l'absolution tant que cet homme ne se serait pas dénoncé aux autorités.
La Commission recommande par ailleurs à la Conférence des évêques de demander au Vatican de modifier le droit canonique afin d'instaurer le célibat volontaire et non plus obligatoire pour les prêtres.
Elle préconise aussi la création d'un Bureau national pour la sécurité des enfants.
En février, elle avait révélé des chiffres effroyables illustrant l'ampleur du problème.
Elle avait indiqué que sept pour cent des religieux catholiques australiens avaient fait l'objet d'accusations d'abus sexuels sur des enfants entre 1950 et 2010 sans que les soupçons ne débouchent sur des investigations. Il était de coutume d'ignorer, voire même de punir, les enfants dénonçant des agressions.
Dans certains diocèses, la proportion atteignait 15% de prêtres soupçonnés de pédophilie. L'Ordre des Frères hospitaliers de Saint-Jean de Dieu était le pire, avec 40% de ses membres mis en cause.
Le plus haut représentant de l'Eglise catholique en Australie, George Pell, avait été entendu trois fois par la commission d'enquête. Il avait reconnu auprès d'elle avoir "failli" dans sa gestion des prêtres pédophiles dans l'Etat de Victoria dans les années 1970.
Le numéro trois du Vatican a par ailleurs été inculpé fin juin pour "des délits d'agressions sexuelles anciennes", selon la police australienne, qui avait fait état de "nombreux plaignants" mais n'avait livré aucune précision sur les faits supposés ni l'âge des victimes présumées.
Des audiences sont prévues à partir de mars à Melbourne pour qu'un tribunal décide de son éventuel renvoi en procès.
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