"Je mange pas mal de pâtes, j'ai ressorti des vêtements de la cave": ces propos anonymes d'une députée LREM qui touchait auparavant 8.000 euros mensuels comme chef d'entreprise, rapportés par le quotidien L'Opinion, ont suscité moult réactions dans les couloirs du Palais Bourbon. "Indécent", "ridicule", ont réagi des députés de divers bords.
L'indemnité, en vigueur depuis 1789 pour permettre à chaque citoyen de se présenter, est fixée par référence au traitement des fonctionnaires occupant les emplois les plus élevés, soit 7.210 euros brut mensuel.
Réfutant l'idée de "privilégiés", le socialiste Stéphane Le Foll a demandé que "s'arrête cette suspicion générale". L'Insoumis Ugo Bernalicis a épinglé "ceux qui étaient dans un autre monde avant (...) et ont l'impression qu'avoir une indemnité de parlementaire c'est trop peu pour vivre".
Nombre d'élus LREM issus du secteur privé avaient des revenus supérieurs. L'un d'eux, qui a gardé une activité professionnelle, glissait il y a quelques semaines qu'avec son train de vie et un emprunt immobilier conséquent, il ne "peut pas vivre avec 5.000 euros".
En moyenne, les députés dans leur ensemble ont déclaré près de 59.000 euros de revenus annuels (4.900 euros mensuels) lors des cinq dernières années, selon Le Monde.
Quid d'une augmentation de l'indemnité? Le président de l'Assemblée François de Rugy (LREM) avait répondu en septembre: "pas de sujet tabou", mais il y a "des questions de priorités" et des "pièges".
Le candidat Macron avait prévu de fusionner l'indemnité parlementaire et l'enveloppe pour frais de mandat (IRFM, 5.840 euros brut), non contrôlée jusqu'alors. Fin novembre, il a été plutôt décidé à l'Assemblée de remplacer l'IRFM par une "avance sur frais" principalement, contrôlée a posteriori.
Avantages scrutés
Malgré un investissement souvent plus important avec notamment le non-cumul, "nos conditions ne sont pas celles de nos prédécesseurs", plaide à l'AFP un primo-député, mais après les lois de moralisation, le sujet des rémunérations risque de "ne plus pouvoir être abordé avant un moment".
Un des groupes de travail sur les réformes de l'Assemblée a suggéré mercredi de plafonner la rémunération tirée de l'activité professionnelle que peuvent exercer en parallèle - et sous conditions - les parlementaires, pour réduire les conflits d'intérêts entre autres.
Le plafond s'élèverait à 50% de l'indemnité, soit des revenus autorisés dépassant 10.000 euros au total. 130 députés prévoient jusqu'à présent de conserver une activité professionnelle, a calculé l'AFP.
Le groupe de travail suggère aussi, sur le modèle britannique, une Agence des moyens des parlementaires, indépendante, qui fixerait et gèrerait indemnités et avantages.
"Pas sûr que ces changements soient à l'agenda", dit un député LREM, alors que l'Assemblée vient d'accoucher au forceps d'une réforme des frais de mandat, objet de critiques sur un manque de transparence.
Sur ce thème sensible, la moindre décision est scrutée.
Nouveau sujet d'interrogations sur d'éventuels avantages: la décision du collège des questeurs début décembre d'une "dotation annuelle globale pour frais de courrier, de téléphone et de taxi" pour les députés (environ 18.900 euros annuels) à partir de janvier, contre trois lignes budgétaires actuellement, dépensées pour moitié.
C'est pour "donner la possibilité de piloter sur la mandature" ce budget selon les besoins de ses équipes, défend le premier questeur Florian Bachelier, opposé sur la question à Laurianne Rossi, questeure LREM également.
Qu'en est-il de la prise en charge prochaine par l'Assemblée de la "contribution personnelle" de 30 euros pour les nuitées en hôtel? "Principe d'égalité" par rapport aux parlementaires bénéficiant de "bureaux-chambres", plaide M. Bachelier. Autre solution de logement, récemment avancée: la location d'un "pied-à-terre parisien", dont le loyer sera réglé par l'Assemblée à la hauteur estimée de 1.200 euros mensuels.
Dans un courrier de six pages cette semaine à ses collègues, M. Bachelier récapitule les décisions prises et rappelle "deux objectifs à la base de notre mandat: le rétablissement du lien de confiance avec nos concitoyens et la modernisation de l'Assemblée nationale".
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