Dans son réquisitoire signé le 29 novembre, le parquet de Paris demande que le Libano-Canadien de 64 ans comparaisse devant une cour d'assises spéciale, seule habilitée à juger les crimes terroristes, a appris mercredi l'AFP de sources proches de l'enquête.
Il estime "les charges suffisantes" à l'encontre d'Hassan Diab, tout en relevant qu'il existe des "doutes" notamment sur sa présence à Paris au moment des faits, a précisé l'une de ces sources.
Le 3 octobre 1980, à 18H40, une forte explosion retentit à la synagogue de la rue Copernic. Dix kilos d'explosif, dissimulés dans la sacoche d'une moto garée devant l'édifice, tuent quatre personnes et font une quarantaine de blessés. Il s'agit alors du premier attentat mortel contre la communauté juive commis en France depuis la Libération.
L'enquête, l'une des plus anciennes instructions encore en cours à Paris, attribue l'attentat, non revendiqué, au Front populaire de libération de la Palestine-Opérations spéciales (FPLP-OS), un groupe né d'une scission du FPLP, et les renseignements français identifient en 1999 Hassan Diab comme celui qui a confectionné l'engin explosif.
Extradé en novembre 2014 du Canada, où il était devenu professeur universitaire en sociologie, il est mis en examen et placé en détention provisoire. Depuis, il clame son innocence.
Le parquet relève plusieurs éléments à charge: "des notes de renseignement convergentes et réitérées", la ressemblance de Diab avec des portraits-robots réalisés à l'époque, la découverte d'un passeport à son nom "avec des tampons attestant que son utilisateur a pénétré en Espagne le 20 septembre 1980 pour en sortir le 7 octobre 1980", des dates "parfaitement compatibles avec la commission de l'attentat".
L'accusation met aussi en avant les comparaisons réalisées entre l'écriture de Diab et celle sur une fiche d'hôtel remplie par l'homme qui a acheté la moto, ou encore le témoignage d'un couple mettant en cause le suspect comme appartenant aux groupes palestiniens au début des années 1980.
"Sérieux doutes"
Mais Hassan Diab assure qu'il était à Beyrouth au moment des faits pour passer ses examens à l'université. En janvier 2016, il a donné au juge d'instruction les noms de deux femmes ayant révisé les épreuves avec lui, qui ont corroboré sa version.
Son ex-épouse, Nawal Copty, a également affirmé qu'il était au Liban le 28 septembre 1980, cinq jours avant l'attentat. Or, à cette date, le détenteur du passeport au nom de Diab se trouvait déjà en Europe d'après les tampons.
Ces éléments avaient conduit le juge d'instruction à "sérieusement douter" qu'il "soit le poseur de la bombe". Il avait demandé à plusieurs reprises, ainsi qu'un juge des libertés et de la détention, sa remise en liberté, avec assignation à résidence et port d'un bracelet électronique. Mais à chaque fois, le parquet de Paris avait fait immédiatement appel et la cour d'appel avait décidé de prolonger la détention.
Les doutes quant à la présence de Diab à Paris, tout comme les contre-expertises qui remettent en cause les premières analyses graphologiques, doivent faire l'objet "d'un examen par une juridiction de jugement", estime le ministère public.
"On a le sentiment que le parquet se sent un devoir envers et contre tout de ne pas soustraire aux parties civiles celui qui leur a été présenté à tort comme un suspect possible et ainsi de les priver d'un procès", ont réagi auprès de l'AFP les avocats d'Hassan Diab, William Bourdon, Apolline Cagnat et Amélie Lefebvre. "Nous attendons la seule décision qui s'impose, une décision de non-lieu", ont-ils ajouté.
Il appartient désormais aux juges d'instruction de décider d'un renvoi ou non devant la cour d'assises spéciale, composée uniquement de magistrats professionnels.
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