A travers plus de 300 pièces - Unes de journaux, maquettes, films et photographies originales-, l'exposition chronologique passe en revue les codes du roman-photo qui, en dépit de son immense succès, "a rarement retenu l'attention des historiens", relèvent les commissaires de l'exposition Frédérique Deschamps et Marie-Charlotte Calafat.
Né en Italie en 1947, alors que la télévision n'a pas encore fait son apparition dans les foyers, "le roman-photo a connu un succès immédiat jusqu'à devenir un best-seller de la littérature populaire mondiale pendant près d'un quart de siècle. Les lecteurs se comptaient en millions", souligne Frédérique Deschamps. Dans les années 60, un Français sur trois lisait des romans-photos.
La production est industrielle mais la fabrication demeure artisanale comme le montrent ces photos retouchées à la gouache, ces dialogues tapés à la machine à écrire puis collés directement sur les photos.
Face à une telle production, les journaux "jetaient les exemplaires à la poubelle", ce qui rendra les recherches "difficiles", découvrira avec surprise Mme Deschamps. La commissaire voit aussi "peut-être" dans ces disparitions la marque "d'un dédain" des créateurs pour ce qui était considéré comme un "sous-genre".
Une première partie de l'exposition est consacrée au "vrai roman sentimental" avec des photographies en noir et blanc et des négatifs, principalement puisés dans le fonds de l'éditeur italien Mondadori et auprès de quelques collectionneurs. Les personnages sont figés, accompagnés de brefs dialogues au service d'une histoires d'amour au ton souvent mièvre.
Johnny et Sylvie
Un peu plus loin, des épisodes mettent en scène les stars de l'époque comme Johnny Hallyday et Sylvie Vartan se prêtant au jeu dans un numéro du magazine Nous Deux qui deviendra la référence du genre.
Jugé infantile par les intellectuels, soupçonné de pervertir les moeurs par les catholiques et accusé d'anesthésier le peuple par les communistes, le roman-photo est aussi le témoin d'une époque, s'attache à démontrer le Mucem.
On découvre à travers ces planches "les aspirations d'une société avec des histoires dans lesquelles les femmes s'interrogent sur leur place dans le couple, l'avortement ou évoquent le divorce", commente Marie-Charlotte Calafat.
Avec des couples en goguette sur une corniche ou au bord d'une piscine les yeux dans les yeux, les Unes colorées du journal Nous Deux qui tapissent la salle de lecture, à la fin de la première partie, permettent au visiteur de se plonger dans les derniers épisodes du magazine encore vendu à 250.000 exemplaires chaque semaine.
Loin des images consensuelles qui marquent les débuts du roman-photo, la deuxième partie de l'exposition permet de découvrir les nombreuses parodies satiriques et détournements que le genre a inspirés, de la BD à la pornographie en passant par la télévision.
Comme ce numéro de Hara-Kiri où le professeur Choron met en scène la rédaction du journal façon roman-photo ou ce sketch télévisé des Nuls où les comédiens se moquent des aventures improbables des héros de roman-photo avec des dialogues surannés.
Le succès du code narratif du roman photo inspira largement les récits pornographiques comme le montrent des planches de la revue italienne Fotosex, dans un espace interdit aux moins de 16 ans.
Un large espace est également consacré à Killing, roman-photo érotique et sadique consacré aux aventures d'un homme masqué qui tue des femmes en tenue légère. Ce personnage sulfureux marqua les esprits, malgré la censure française qui mit un terme à l'aventure en juin 1967 après 19 numéros.
Des images simples, un texte court au service d'une histoire rapide à comprendre, l'efficacité du roman-photo ne cessera d'essaimer jusqu'à être adapté pour une campagne contre le Sida en 1999 du ministère de la Santé.
(Exposition Roman-Photo au Mucem du mercredi 13 décembre 2017 au lundi 23 avril 2018)
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