L'ancienne présidente de gauche (2007-2015), élue sénatrice en octobre, bénéficie d'une solide immunité parlementaire.
C'est le juge fédéral Carlos Bonadio qui a mis en examen Mme Kirchner pour "trahison" et demandé son placement en détention. En octobre, il l'avait convoquée et l'ex-présidente avait rejeté ses accusations.
Le juge considère qu'un pacte qu'elle avait conclu en 2012 avec l'Iran était une manière de permettre aux suspects iraniens de se dérober à la justice argentine.
L'accord prévoyait que des hauts fonctionnaires iraniens, soupçonnés d'avoir commandité l'attentat contre la mutuelle Amia, soient entendus par des magistrats argentins à Téhéran faute de pouvoir le faire à Buenos Aires.
Le pacte avait été approuvé par le Parlement argentin, mais l'Iran n'avait finalement pas respecté les termes de l'accord.
Nisman à l'origine
Cristina Kirchner, 64 ans, a prêté serment la semaine dernière comme sénatrice. Avant tout placement en détention, le Sénat devrait d'abord voter la levée de son immunité.
Il semble toutefois peu probable que le Sénat puisse rallier les deux tiers des voix pour lever cette immunité.
A partir du 10 décembre, la coalition gouvernementale disposera de 25 sièges sur 72 au Sénat, alors que le mouvement péroniste auquel appartient Mme Kirchner en comptera 32, mais seulement une dizaine répondant directement aux ordres de Mme Kirchner.
L'accusation pour entrave à l'enquête au profit de l'Iran avait d'abord été lancée en 2015 par le procureur Alberto Nisman, à la tête du parquet.
Mais la veille de présenter son accusation contre Mme Kirchner au Parlement, il avait été retrouvé mort dans son appartement de Buenos Aires.
Comme celle sur l'attentat de 1994, l'enquête sur les causes de la mort de Nisman - suicide ou meurtre - n'a pas abouti.
L'Iran est accusé par Buenos Aires et Israël d'avoir commandité l'attentat de 1994 contre le bâtiment abritant les institutions juives d'Argentine, qui constitue le plus grave acte antisémite jamais perpétré en Amérique latine, mais aucun procès n'a pu avoir lieu jusqu'ici pour juger les responsables.
Le juge Bonadio a repris début 2017 l'enquête entamée par le procureur Nisman.
Entrave, acte II
En revanche, une autre accusation pour entrave antérieure à l'enquête, dans les années qui ont suivi l'attentat, est actuellement jugée lors d'un procès dont les accusés sont l'ex-président Carlos Menem (1989-1999), le juge en charge de l'enquête dans les années 1990 Juan José Galeano et le patron des services de renseignement de l'époque.
M. Menem, condamné à sept ans de prison dans une affaire de vente d'armes pendant son mandat (1989-1999), continue de vivre en liberté en Argentine grâce à son immunité de sénateur. A 87 ans, il a été réélu en octobre et vient d'entamer un nouveau mandat de quatre ans.
Cristina Kirchner, qui avait quitté le pouvoir fin 2015 après deux mandats de quatre ans, a fait en 2017 son retour en politique en décrochant en octobre un siège de sénatrice. Elle pèse encore entre 20 et 30% des voix au niveau national, selon les estimations.
La justice a également ordonné jeudi l'arrestation de l'ex-ministre argentin des Affaires étrangères Hector Timermann et de plusieurs autres hauts responsables.
Mise en examen dans d'autres affaires de corruption, Cristina Kirchner clame son innocence et dénonce "une persécution politique" de la part de la justice, qu'elle estime aux ordres du gouvernement de centre-droit de Mauricio Macri, qui lui a succédé.
"C'est un grand scandale judiciaire. L'objectif est de faire peur aux dirigeants de l'opposition au Parlement. Ils veulent un Parlement soumis", avait dit Mme Kirchner après sa convocation par le juge Bonadio.
De son côté, le gouvernement du président Macri nie exercer toute ingérence sur la justice.
Jeudi, le plus proche conseiller des présidents Nestor et Cristina Kirchner, Carlos Zannini, a été placé en détention préventive dans la même affaire.
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