M. Santos, qui a signé la paix le 24 novembre 2016 avec le chef des Farc, Rodrigo Londoño "Timochenko", défend l'aspect novateur de ce texte marquant la fin à plus de 53 ans de confrontation avec la puissante guérilla marxiste.
Lors d'une rencontre jeudi avec la presse étrangère à Bogota, il a salué le "désarmement exemplaire" des 7.000 combattants des Forces armées révolutionnaires de Colombie. L'ex-rébellion a remis 8.994 fusils à l'ONU et s'est reconvertie en parti politique. Gardant le même acronyme Farc (Force alternative révolutionnaire commune), elle participera aux élections de 2018.
Il a toutefois admis la persistance de problèmes issus de ce conflit impliquant forces de l'ordre, paramilitaires et guérillas, sur fond de lutte pour le trafic de drogue.
Mais M. Santos a réitéré le caractère "irréversible" du processus et l'"opportunité" d'en finir avec le classement peu glorieux de la Colombie comme premier producteur mondial de cocaïne. Extraits de l'entretien:
Un an de paix, un bilan contrasté?
"Le désarmement a été exemplaire. En moins d'un an, toutes les armes ont été déposées, enregistrées. Il y a eu ici plus d'armes que de guérilleros. Cela ne s'était jamais vu. Quant aux dissidents (9% selon International Crisis Group, 4,4% selon le gouvernement), sont partis ceux qui étaient liés au narcotrafic, ceux qui perdaient le plus.
Il y a des critiques contre la participation politique des Farc. Dans tout processus de paix, il s'agit de passer de la guerre à la politique. Nous sommes en train d'innover pour que la justice (spéciale de paix) soit compatible avec la participation politique. C'est une justice plus réparatrice que punitive. Seuls les hauts responsables seront sanctionnés, les autres seront amnistiés.
La réincorporation est un grand défi (...) 70% de ces personnes sont analphabètes. Il y a une différence entre la base de la guérilla et les leaders qui veulent les maintenir dans les zones (de réintégration) avec des projets collectifs. La base pense autrement, veut des formations individuelles. Cela a beaucoup retardé le processus.
Il y a des retards aussi quant aux terres. Nous avions dit que nous donnerions des terres aux paysans des zones où sont les Farc. Mais elles veulent contrôler à qui on donne et à qui non. Les programmes de développement sont pour les zones rurales (...) pas pour les Farc.
Ce sont des sursauts. Nous sommes dans un processus de transition."
Quelle est votre principale inquiétude?
"L'extrême droite et l'extrême gauche attaquent le processus. J'ai dit dès le début que ce processus serait très difficile (...) et qu'il y aurait sûrement des critiques d'un côté et de l'autre. C'est le cas depuis le départ, avec un secteur demandant plus de justice et un autre plus de paix.
Ce qui me préoccupe, c'est que les gens perdent l'espérance dans la paix. Mais les gens ont la mémoire très courte. Ils ont oublié comment c'était avant.
Certains veulent voir le verre à moitié plein, d'autres à moitié vide. Au gouvernement, nous le voyons à moitié plein."
Quelles sont les perspectives d'avenir?
"Ce processus est irréversible. Il sera impossible pour le prochain président, quel que soit son parti, de revenir en arrière.
C'est une opportunité en or pour que la Colombie résolve le problème de la drogue. La solution de fond doit être consensuelle avec les cocaleros (petits paysans cultivateurs de la coca, composant de base de la cocaïne). Avant, ce n'était pas possible parce que les Farc l'empêchaient.
Il y a de grandes plantations de narcotrafiquants qui ne veulent absolument pas intégrer le processus de substitution. Alors le bâton de l'éradication forcée doit être maintenu, avec la carotte de la substitution volontaire.
J'aspire à ce que d'ici au mois d'avril 50.000 ha (des 146.000 ha de plantations de coca recensés par l'ONU) soient substitués volontairement par des cultures légales.
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