C'en est un motif de plaisanterie, même pour l'intéressé qui appelle à rester "prudent": seul en course et plébiscité publiquement par cadres et militants, Christophe Castaner sera élu sans suspense au poste de "délégué général" samedi matin par le Conseil, c'est à dire le parlement, de La République en marche.
Le score soviétique qui s'annonce signifie-t-il pour autant un scrutin anti-démocratique ? "C'est vrai que la France adore les combats de coqs" entre postulants, ironise M. Castaner, "mais on peut aussi se dire que ma candidature était une évidence".
Une évidence pour beaucoup mais pas pour lui-même.
Déjà porte-parole du gouvernement et secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement, M. Castaner reconnaît ne pas avoir "rêvé" du poste.
Le peu de profils disponibles pour remplir ce rôle l'ont rendu incontournable et il a fallu se plier au mantra de la Macronie: "on n'est pas demandeur, mais on a une mission".
Ses nouvelles fonctions, non rémunérées, vont l'obliger à abandonner au moins le porte-parolat et certains, y compris dans son camp, poussent pour un départ du gouvernement en jugeant sa casquette de chef de parti incompatible avec son secrétariat d'Etat. M. Castaner retournerait alors sur les bancs de l'Assemblée nationale, comme député des Alpes-de-Haute-Provence.
Quoiqu'il arrive, son élection entraînera donc un remaniement en début de semaine prochaine qui devrait toutefois rester d'ampleur limitée.
Le consensus Castaner
Quinquagénaire volubile et chaleureux, M. Castaner a été adoubé par l'Elysée pour sa nouvelle envergure politique et ce qu'il incarne: un +marcheur+ de la première heure, à la fois proche d'Emmanuel Macron et facile au contact avec les simples adhérents.
"Qui fait consensus aujourd'hui? Castaner", résumait vendredi un ministre. Et d'insister: "le mouvement n'est pas encore mature complètement mais laissons émerger des leaders -ceux qui existent déjà sont au gouvernement et à l'Assemblée-, et la meilleure personne pour les faire émerger, c'est Castaner".
M. Castaner dit, lui, vouloir "remettre le mouvement en mouvement".
"Je sais ce que je lui dois, ce que je dois aux marcheurs", rappelle-t-il aussi, en développant un programme en trois axes: que chacun trouve de "l'utilité et de la responsabilité"; "élaborer le corpus idéologique" d'un parti centré sur le programme présidentiel; et "préparer les échéances politiques", dont les européennes de 2019.
Alors que La République en marche s'est engagée sur d'ambitieux chantiers (formation militante, grande marche européenne...), grâce au jackpot des subventions publiques (20 millions d'euros par an), M. Castaner ne veut pas "nier les difficultés".
"Le siège s'est un peu perdu, il a été un peu vide" ces derniers mois, consent-il en promettant de redonner de l'impulsion à une base militante de 380.000 adhérents revendiqués, sans que l'on sache précisément le nombre de "marcheurs" actifs.
"La comptabilité pour faire le cacou, ça n'a pas beaucoup d'intérêt", balaie l'ancien maire de Forcalquier. "La seule comptabilité que je voudrais qu'on tienne, c'est celle de l'action."
M. Castaner devra aussi apaiser les quelques remous en interne liés à l'élection des 20 membres de son bureau exécutif.
Quatre listes sont en lice samedi. La favorite a été élaborée par et pour M. Castaner mais sa composition, jugée trop "parisienne" et éloignée de la base, fait jaser.
Trois autres listes se sont engouffrées dans la brèche, en revendiquant chacune d'incarner la diversité d'un mouvement fondé sur la promesse d'un renouvellement des usages et des visages.
L'une d'entre elles parviendra-t-elle à déjouer les pronostics ?
Auparavant, il faudra déminer un autre sujet sensible: le vote à main levée, prévu par les statuts pour l'élection du bureau exécutif.
Plus de 200 des 750 membres du Conseil, dont certains craignent un "flicage", espèrent que ce scrutin sera finalement organisé à bulletins secrets. Ce sera le cas si la moitié des présents le décident lors d'un vote préalable.
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