"Vous savez pourquoi nous ne sommes pas encore indépendants? Parce qu'il n'y a pas eu une majorité de Catalans à l'avoir souhaité", a déclaré mardi à Madrid le député Joan Tarda, de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC, indépendantiste), premier parti indépendantiste, selon les sondages.
Des paroles prononcées un peu plus de 15 jours après la déclaration d'indépendance votée au Parlement catalan le 27 octobre, qui a secoué l'Espagne et l'Europe, avant d'être suivie de la mise sous tutelle de la région par Madrid.
Le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy avait alors aussi destitué l'ensemble du gouvernement catalan et annoncé la tenue d'élections régionales dès le 21 décembre.
Au soir du 27 octobre, beaucoup se demandaient si les partis indépendantistes joueraient le jeu de ce scrutin. Et ils ont finalement accepté d'y participer.
Nouvelle 'feuille de route'
Depuis la Belgique où il est parti juste avant d'être convoqué par la justice espagnole pour "rébellion" et "sédition", le président catalan destitué Carles Puigdemont a même estimé qu'une autre solution que l'indépendance de sa région était "possible", assurant être "toujours pour un accord" avec l'Espagne.
Les trois partis allant de la droite à l'extrême gauche qui prônent la sécession se préparent à une campagne inédite : leurs principaux leaders sont soit incarcérés soit en Belgique. Et ils doivent en quelques semaines soumettre aux électeurs leur nouvelle "feuille de route", la précédente, qui prévoyait l'indépendance dès 2017, aayant échoué.
Ils "ne renoncent pas à l'indépendance, mais ne donnent plus de date", du moins pour l'instant, souligne Gabriel Colomé, professeur de sciences politiques à l'Université autonome de Barcelone.
En 2015 les indépendantistes avaient promis de faire sécession dans les 18 mois, le temps de mettre en place un Etat.
Ils peuvent désormais revenir au point de départ, en proposant dans leur programme de se battre pour l'organisation d'un référendum en accord avec l'Etat, sur le modèle écossais, explique Ferran Requejo, professeur de sciences politiques à l'université Pompeu Fabra à Barcelone.
Ou "un accord bilatéral pour des négociations, pour trouver un modèle, sans rupture avec l'Etat, dans lequel le gouvernement autonome, tant au niveau politique qu'économique et culturel, prendrait les principales décisions", note-t-il.
A la différence du scrutin de 2015, les indépendantistes n'ont pas présenté de liste commune.
'Majorité plus large'
L'enjeu reste de garder, à trois, la majorité absolue des sièges dont ils jouissaient en 2015 avec 72 élus sur 135, et même de dépasser leur score de l'époque (47,8% des voix pour les formations indépendantistes).
"Nous devons obtenir une majorité plus large", pour pouvoir exiger des négociations avec l'Etat espagnol, indique un membre d'ERC sous couvert de l'anonymat. Résister à l'action "répressive" de l'Etat aurait "entraîné un bain de sang qui n'est pas acceptable ici", ajoute-t-il.
ERC a annoncé qu'elle ferait "front commun" avec "Junts per Catalunya", la liste de Puigdemont, sur certains éléments de programme, comme la lutte pour la libération des prisonniers.
Les élections doivent permettre "d'homologuer" la majorité indépendantiste, souligne l'élu, assurant qu'elle a déjà été démontrée par les résultats du référendum du 1er octobre (90% de oui avec un taux de participation de 43%), qui n'ont toutefois été reconnus par personne.
Poussé par les poursuites judiciaires contre ses leaders, le mouvement indépendantiste continue à mobiliser régulièrement des centaines de milliers de personnes dans les rues.
Malgré l'échec des promesses, "l'électorat indépendantiste, tout au moins le noyau dur, garde confiance dans ses dirigeants", juge le politologue Oriol Bartomeus, de l'Université autonome de Barcelone. Mais "jusqu'à quand", s'interroge-t-il.
Le jeu est très serré, car cette fois, "le bloc constitutionnaliste (favorable à l'Espagne) va aller voter en masse", prédit Gabriel Colomé.
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