Mal aimée, cette espèce majestueuse a aussi été décimée par des anti-inflammatoires utilisés dans l'élevage.
D'une envergure de 2 mètres pour un poids pouvant atteindre 7,5 kg, le Gyps bengalensis, jadis très commun dans les cieux du sous-continent indien, a vu sa population s'effondrer de plus de 99% depuis les années 90, selon la branche locale du Fonds mondial pour la nature (WWF).
Depuis 2005, le WWF gère avec le soutien financier d'autres organisations un centre pour tenter de secourir ces vautours, à une centaine de kilomètres de la capitale culturelle Lahore (est).
Plumage blanc et gris cendré, bec puissant emmanché d'un long cou rose, les oiseaux font le guet depuis leurs perchoirs de bois dans l'enceinte grillagée, haute d'une dizaine de mètres.
Ils sont enfermés mais, au moins, en sécurité. L'objectif de ce centre est de maintenir l'espèce en vie en attendant que les conditions à l'extérieur permettent de relâcher ces oiseaux, ce qui n'est pas le cas actuellement.
"Dans le temps, il y avait beaucoup de vautours au Pakistan", explique la coordinatrice du projet, Warda Javed.
"Mais du fait de différentes menaces, en premier lieu un médicament anti-inflammatoire non stéroïdien, le diclofénac, dont l'ingestion provoque une soudaine insuffisance rénale chez les vautours, il y a eu un rapide déclin de la population", note-t-elle.
Le diclofénac est utilisé comme antalgique par les éleveurs et fait indirectement des ravages parmi les vautours qui consomment les carcasses d'animaux.
Le WWF mène parallèlement une campagne auprès des autorités, des vétérinaires et des groupes pharmaceutiques pour pousser au remplacement de ce médicament dans l'élevage par un autre, le méloxicam, sans danger pour les oiseaux.
Le diclofénac a été interdit dès 2006 en Inde, où la population de vautours s'est également effondrée, passant de millions d'individus à quelques milliers en un peu plus d'une décennie.
Quatre bébés vautours sont nés ces deux dernières années dans le centre. Ils sont aujourd'hui âgés de 8 et 18 mois.
"Le processus pour parvenir à ce succès en matière de reproduction a été très long. Donc pour le moment, jusqu'en 2020, nous ne prévoyons pas de les relâcher tant que nous ne disposons pas d'un environnement sous contrôle à l'extérieur du centre", souligne Mme Javed.
"Outre le diclofénac, d'autres menaces ont été identifiées", explique-t-elle en allusion à d'autres médicaments également utilisés dans l'élevage, l'acéclofénac, le kétoprofène et la fluxinine.
Funérailles célestes
Les vautours jouent un rôle essentiel dans l'écosystème en consommant les animaux morts, évitant leur décomposition dans la nature.
Le Pakistan compte huit espèces de vautours dont deux, le vautour à dos blanc et le vautour indien, sont en danger critique d'extinction, selon la classification de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
Les vautours à dos blanc consommaient jadis des dépouilles humaines au Pakistan et dans d'autres pays de la région, dans le cadre des "funérailles célestes" de la communauté zoroastrienne (appelée parsis au Pakistan). Les corps étaient placés sur des "Tours du silence" pour y être dévorés par les charognards.
Ces rites ne sont plus guère pratiqués dans la région, notamment en raison de la disparition des vautours. Au Pakistan, la communauté parsie elle-même, basée essentiellement à Karachi (sud), est en plein déclin.
Mais les augustes rapaces souffrent aussi d'un problème d'image auprès du grand public, que le WWF cherche à corriger.
"Nous essayons de communiquer au grand public que les mythes généralement associés à ces espèces ne reposent pas sur des faits et relèvent du folklore", explique Fatima Arif, de WWF-Pakistan.
"Dans notre société, les vautours sont toujours associés à des choses négatives. Pourtant, ce sont des oiseaux très timides et des parents très attentifs", dit-elle.
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