Arrivé jeudi soir à Nantes, après une cavale de 8.000 km depuis Irkoutsk en Sibérie, le fugitif s'est expliqué avec force détails au cours d'une conférence de presse de plus d'une heure et demie.
En fuite depuis septembre 2016, il avait été condamné par contumace en décembre 2016 à 15 ans de camp à régime sévère par la justice russe pour des actes sexuels sur sa fille, ce qu'il a toujours nié. Il affirme avoir été victime d'un complot, avec preuves fabriquées.
Chemise noire et écharpe blanche à rayures rouges, il a raconté sa fuite à l'aide de l'application de covoiturage Blablacar ("je me suis fondu dans le paysage, je voyageais avec des Russes") puis la traversée de la frontière à pied et de nuit pendant une dizaine d'heures. "J'ai croisé des loups dans la forêt", a-t-il assuré devant des journalistes et des proches.
Très remonté contre le Quai d'Orsay, il a brocardé la "lâcheté" des diplomates, ciblant particulièrement l'ancien ambassadeur Jean-Maurice Ripert ou l'ancien ministre Jean-Marc Ayrault, Nantais lui aussi.
M. Barbereau a notamment raconté que les autorités russes avaient été averties par la diplomatie française de sa présence dans l'ambassade "15 minutes après" son entrée dans le bâtiment, en septembre 2016.
Coincé sur place pendant quatorze mois, il s'en est échappé en utilisant "une faille de sécurité", il y a quelques jours, pour rejoindre l'Union européenne avec l'aide d'un ami russe, a-t-il dit. "Trop de personnes étaient au courant de ma présence dans l'ambassade. Ça commençait à circuler dans la communauté française", a-t-il expliqué.
Zones d'ombres
Photos tronquées, ordinateur piraté... Le Nantais, âgé de 39 ans, a aussi été longuement interrogé sur les raisons qui auraient pu conduire les autorités russes à monter un dossier de toutes pièces contre lui, un aspect de son histoire qui reste encore mystérieux.
"Ce qui est certain c'est que ce n'est pas un coup de Moscou, ce n'est pas un coup de Poutine, ça ne l'intéresse pas", a-t-il affirmé, même si "beaucoup plus tard, il l'a exploité".
En poste depuis 2012 à Irkoutsk, M. Barbereau a dit s'être rapproché au fil du temps du maire de la ville, un opposant au pouvoir russe. "Sans doute, c'est un des facteurs qui m'a amené en prison. Je suis tombé en même temps que le maire qui était un ami", a-t-il avancé, évoquant par ailleurs une "situation politique locale très trouble", des "luttes d'influences au FSB (ex-KGB)".
Il a aussi cité la "crise ukrainienne" et le "sentiment anti-européen" qui l'a accompagné. "On n'arrêtait pas de me parler des Mistral localement", a-t-il dit en référence au contrat d'armement annulé par la France en pleine tension avec la Russie.
Interrogé sur des rumeurs d'aventures sexuelles avec la femme du maire et la femme du procureur, qui auraient pu chercher à lui nuire, il affirme qu'il s'agissait "d'écrans de fumée". "Si pour me défendre d'accusations de pédophilie, il avait fallu que je dise que j'avais couché avec la femme du maire ou du procureur, croyez bien que je l'aurais fait immédiatement", a-t-il rétorqué.
Enfin il a aussi démenti avoir travaillé pour les services de renseignement français. "Si j'avais été un agent de la DGSE, il y aurait très longtemps que j'aurais été exfiltré. L'affaire n'aurait pas duré deux ans et demi", a-t-il dit.
Avant l'élection présidentielle française, "j'ai rencontré deux agents de la DGSE qui sont venus à Moscou travailler avec moi sur un scénario d'exfiltration", a-t-il toutefois expliqué. Mais l'option a été abandonnée peu après.
M. Barbereau réclame aujourd'hui une indemnisation au Quai d'Orsay, souhaite "être lavé de toute accusation" et "retrouver une liberté de mouvement totale", alors qu'il est toujours visé par un mandat d'arrêt russe.
Vendredi, la Russie a même annoncé de nouvelles poursuites contre lui pour avoir quitté illégalement le pays.
Le Quai d'Orsay, sollicité à plusieurs reprises par l'AFP, garde toujours le silence sur cette affaire.
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