Ils sont de plus en plus nombreux chaque année à attendre cette date du 1er novembre.
En 2016, 15.222 ménages ont été expulsés avec le concours de la force publique, soit environ 34.400 personnes, selon la Fondation Abbé Pierre. Un "très mauvais chiffre" en légère hausse (+0,47%) par rapport au "sombre record" de 2015 (15.151 expulsions), et qui représente une augmentation de 140% sur 15 ans, souligne le délégué général de la fondation, Christophe Robert.
"La réalité des expulsions est de deux à trois fois supérieure puisqu'il y a des gens qui quittent leur logement sans intervention des forces de l'ordre", ajoute-t-il.
Jusqu'au 31 mars, les personnes menacées d'expulsion bénéficient d'un sursis. Pour la première fois, les habitants des bidonvilles sont également concernés par cette trêve, qui leur a été étendue par la loi Egalité et Citoyenneté.
"Deux exceptions sont prévues: s'il existe une solution de relogement adaptée ou si les locaux font l'objet d'un arrêté de péril", détaille Christine Vales, de la Chambre nationale des huissiers de justice.
Un juge peut également autoriser une expulsion durant cette période, notamment si les occupants ont pénétré dans des locaux par voie de fait.
Si les expulsions sont gelées, les procédures, elles, se poursuivent. Mais une éventuelle décision d'expulsion ne sera effective qu'au 1er avril.
Le nombre de décisions de justice prononçant une expulsion et de commandements de quitter les lieux ont été en 2016 en légère baisse par rapport à 2015, respectivement à 128.146 (contre 132.196) et 63.081 (contre 67.905).
"Peut-être qu'il y a un sursaut dans la prévention", espère Christophe Robert: "Mais le fort nombre d'expulsions avec le concours de la force publique révèle quand même l'échec des étapes qui précèdent pour éviter cette extrémité. C'est là qu'il faut agir".
"Impulsion" gouvernementale
"Il ne faut pas attendre le 31 mars pour découvrir qu'on va encore avoir une augmentation des expulsions. C'est maintenant que ça se joue. On voudrait que cette trêve soit mise à profit dans une logique de recherche de solutions alternatives", poursuit-il.
Face à cette "situation très préoccupante", "il faut une mobilisation générale", abonde Florent Gueguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité (ex-Fnars).
Les associations attendent "une impulsion" du gouvernement sur ces questions de logement, propre à les rassurer après l'"inquiétante attaque sur les APL", selon Christophe Robert.
"Pour enrayer les expulsions locatives, il faut mobiliser avec des objectifs chiffrés les bailleurs sociaux, les bailleurs privés, les huissiers, les CAF (caisses d'allocations familiales), les associations et dire +Il y a tant de personnes menacées d'expulsions, allons au devant de ces personnes pour trouver des solutions+. Cette mobilisation est très insuffisante", estime-t-il.
"Il faut une ambition, créer une dynamique au plus haut niveau de l'Etat qui descende jusque dans les territoires. On ne va pas relâcher la pression là-dessus", assure Christophe Robert.
"On a aussi un vrai problème avec l'Etat sur les expulsions de ménages reconnues prioritaires Dalo", bénéficiant du Droit au logement opposable et dont l'expulsion sans relogement est interdite par une circulaire de 2012, ajoute Florent Guegen.
Selon le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, 36 ménages dans cette situation ont été expulsés depuis le début de l'année (47 en 2016).
Autre sujet d'inquiétude: le nombre de familles vivant dans la rue, qui "atteint un pic jamais vu depuis une dizaine d'années sans que l'Etat ou les collectivités locales aient de réponse à donner", s'alarme Florent Gueguen.
Durant les prochains mois, elles pourront bénéficier des places supplémentaires, qui ouvriront progressivement à partir de mercredi dans le cadre du "plan hiver".
Environ 10.000 places d'hébergement d'urgence seront mises à disposition, en plus des près de 120.000 déjà existantes. Mais au-delà, "il faut préparer la fin de l'hiver", exhorte Florent Gueguen.
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