Dans leur rapport très attendu, des experts de l'ONU et de l'OIAC (Organisation pour l'interdiction des armes chimiques) ont estimé jeudi que le régime de Damas est bien responsable de l'attaque.
Les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni avaient accusé les forces de M. Assad d'être responsables de cette attaque mais Damas avait démenti toute implication.
Les éléments rassemblés vont dans le sens du "scenario le plus probable" selon lequel "le gaz sarin a été le résultat d'une bombe larguée par un avion", affirme le rapport, "certain que le responsable de cette attaque sur Khan Cheikhoun est le régime syrien".
L'attaque au gaz sarin du 4 avril à Khan Cheikhoun, dans la province d'Idleb (nord de la Syrie), alors contrôlée par des rebelles et des jihadistes, avait fait 83 morts selon l'ONU, au moins 87 dont plus de 30 enfants selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).
Les images des habitants agonisants de Khan Cheikhoun, dont de nombreux enfants, avaient fait le tour du monde et poussé Washington à lancer une attaque sans précédent sur la base aérienne d'où, selon les puissances occidentales, était partie l'attaque. Le président américain Donald Trump avait qualifié de "boucher" son homologue syrien.
Mais la diplomatie russe, qui estime que le sarin provenait de l'explosion d'un obus au sol et non d'une attaque aérienne syrienne, a dénoncé "de nombreuses contradictions, des incohérences logiques, une utilisation de témoignages douteux et de preuves non confirmées" dans le rapport des experts de l'ONU.
'Comme une arme'
"A la différence de nos interlocuteurs, qui dorment et ne rêvent de ce rapport que pour l'utiliser comme une arme pour leurs propres objectifs géopolitiques en Syrie, nous avons tranquillement et professionnellement étudié le contenu de ce document", a ajouté le ministre adjoint des Affaires étrangères Sergueï Riabkov à l'agence Interfax, précisant que Moscou livrerait une "analyse" complète plus tard.
De son côté, l'ambassadrice des Etats-Unis aux Nations unies, Nikki Haley, a estimé dès jeudi que "le Conseil de sécurité doit envoyer un message clair: aucun usage d'arme chimique ne sera toléré et il faut apporter un soutien total aux enquêteurs indépendants".
"Tout pays qui se refuse à le faire ne vaut pas mieux que les dictateurs et les terroristes qui utilisent ces armes terribles", a-t-elle ajouté.
Le rapport a livré une "conclusion claire", a abondé jeudi le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, exhortant la Russie "à cesser de couvrir son abject allié et tenir son propre engagement, qui est de s'assurer que les armes chimiques ne soient plus jamais utilisées".
L'ONG internationale basée à New York Human Rights Watch (HRW) a réclamé vendredi au Conseil de sécurité des sanctions contre les responsables d'attaques chimiques en Syrie et dénoncé "l'usage répété par la Syrie d'armes chimiques".
'Pas d'avenir'
Quelques heures avant les conclusions des experts de l'ONU, le secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson avait affirmé que le régime de Damas n'avait "pas d'avenir", un message qui avait rarement été aussi clair.
"Nous ne pensons pas qu'il y ait un avenir pour le régime Assad et la famille Assad", a déclaré M. Tillerson jeudi à Genève où il a rencontré l'émissaire des Nations unies pour la Syrie, Staffan de Mistura.
"Je pense l'avoir dit à plusieurs occasions. Le règne de la famille Assad arrive à sa fin, la seule question qui reste est de savoir comment cela sera provoqué", a poursuivi le chef de la diplomatie américaine.
L'ambassadeur russe aux Nations unies, Vasily Nebenzia a rétorqué dès jeudi que "nous ne devrions pas anticiper l'avenir, le futur seul sait ce qui attend chacun".
Le rapport des experts de l'ONU et les propos de M. Tillerson ont éclipsé l'annonce par Staffan de Mistura d'un nouveau cycle de pourparlers sur la Syrie à partir du 28 novembre à Genève, sous l'égide de l'ONU.
Staffan de Mistura a déjà organisé sept sessions de discussions entre le régime syrien et l'opposition sans parvenir à surmonter le principal obstacle qui concerne le sort de Bachar al-Assad. Soutenu par les forces armées iraniennes et russes, ce dernier n'a pas abandonné les rênes du pays, plongé depuis 2011 dans une guerre civile sanglante.
Plusieurs puissances occidentales, l'opposition syrienne et les pays arabes voisins l'accusent d'être responsable des 333.000 morts du conflit.
Sous Barack Obama, les Etats-Unis avaient assuré à de nombreuses reprises que ses jours à la tête de la Syrie étaient comptés, mais l'ancien président démocrate avait refusé de recourir à des frappes militaires après de précédentes accusations d'utilisation d'armes chimiques par Damas.
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