"Mon idée c'était d'ouvrir les bosquets, fermés pendant l'hiver, et qui constituent sans doute le plus beau musée de plein air du monde", explique Catherine Pégard, présidente du Domaine de Versailles. "Les ouvrir grâce à l'art contemporain était tout à fait en relation avec le dialogue institué ces dernières années entre la création et le patrimoine à Versailles", ajoute-t-elle.
Depuis 2008, Versailles a accueilli chaque année au printemps un artiste contemporain. Souvent audacieuses, certaines de ces expositions ont suscité des polémiques, en particulier celle confiée à Anish Kapoor.
Pour concevoir ce "Voyage d'hiver" , titre d'un recueil de lieder de Franz Schubert, Alfred Pacquement, commissaire du château pour l'art contemporain, a fait appel au président du Palais de Tokyo, Jean de Loisy. Ils ont invité seize plasticiens à prendre leurs quartiers d'hiver dans la demeure du "Roi-Soleil".
"La transformation de soi par l'accord entre l'homme et la nature, c'est de là qu'est venue l'idée du Voyage d'Hiver", accessible jusqu'au 7 janvier, déclare Jean de Loisy. "Nous avons choisi un parcours de quatorze bosquets, les plus beaux du château, qui ressemble un peu au parcours qu'on faisait faire aux ambassadeurs autrefois", précise-t-il.
Chacun de ces bosquets, sorte de cabinets de verdure aménagés dans les espaces boisés entre les allées, "a fait l'objet d'une commande. Tous les artistes ont travaillé sur la signification profonde du lieu, et Dieu sait qu'à Versailles, les symboles sont importants", ajoute le président du Palais de Tokyo.
"Sculptures, installations sonores, reflets, oxydations, glaciations sont quelques-unes des techniques utilisées pour transformer la flânerie du visiteur en une expérience personnelle", expliquent de MM. Loisy et Pacquement, assistés de Rebecca Lamarche-Vadel et Yoann Gourmel.
Lacérations
Au centre du Bosquet de la Salle de Bal, Stéphane Thider a utilisé la glace pour évoquer les grands ballrooms de Detroit, aujourd'hui à l'abandon. Vestiges cristallisés d'une époque révolue, des chaises égarées, un piano renversé fondent doucement, évoquant l'inexorable cours du temps. Mais la nuit, un dispositif technique soigneusement dissimulé permet de reconstituer la couche de glace.
Pionnière de l'utilisation du textile dans l'art contemporain, Sheila Hicks a métamorphosé le Bosquet de la Colonnade : la sculpture de "L'Enlèvement de Proserpine", symbole de l'arrivée de l'hiver, est enveloppée grande bandes de tissus colorés qui rayonnent autour d'elle. L'artiste a également réalisé une barrière en branchages entrelacés. "IIs pensaient protéger les oeuvres avec des barrières en métal. Ce n'est pas du tout l'esprit de Versailles", dit-elle.
Hicham Berrada a choisi le Bosquet des Dômes pour construire six colonnes couvertes d'un toit doré où des concrétions de bronze se dégradent sous l'effet de courants électriques. Dans le Bassin du Miroir, Anita Molinero a installé cinq groupes de sculptures réalisés avec des conteneurs de plastique rouge transformés en objets baroques à coup de lacérations et de brûlures. Fasciné par les toiles d'araignée, Tomas Saraceno a déployé dans le Jardin du Roi une grande structure aérienne dans laquelle sont insérés des miroirs.
Pour le Bosquet du Dauphin, Dominique Petitgand a imaginé une installation de 24 haut-parleurs répartis dans les allées et diffusant "une narration fragmentée", tandis que le Suisse Ugo Rondinone a choisi le monumental bassin d'Apollon pour dresser un cercle de bois entrelacé et doré, déjà adopté par les cygnes de l'immense plan d'eau.
"On est passé du regard sur les jardins d'un seul artiste pendant plusieurs saisons à des créateurs, d'horizon, de culture et d'âge très différents, qui ont construit leur chemin dans Versailles. C'est une nouvelle découverte du château", assure Catherine Pégard.
Depuis 2008, Jeff Koons, Xavier Veilhan, Takashi Murakami, Bernar Venet, Joana Vasconcelos, Giuseppe Penone, Lee Ufan, Anish Kapoor et Olafur Eliasson se sont succédé comme artiste invité à Versailles.
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