Avec la chute de son ex-capitale dans le pays en guerre, le groupe ultraradical voit son "califat" presque s'écrouler en Syrie et en Irak voisin, à la suite de multiples offensives pour le déloger des régions conquises depuis 2014.
Après l'annonce de la prise totale de la ville septentrionale par les Forces démocratiques syriennes (FDS), ses combattants ont envahi l'emblématique rond-point d'Al-Naïm, où l'organisation jihadiste menait les exécutions.
Certains étaient émus jusqu'aux larmes, d'autres affichaient un grand sourire, brandissaient le drapeau jaune des FDS, ou se prenaient en photo.
Autour d'eux, un paysage de désolation: des immeubles en ruines, des rues remplies de décombres et de carcasses de voitures, dans une ville ravagée par plus de quatre mois de combats et de bombardements aériens.
Il y a eu 3.250 morts -1.130 civils y compris 270 enfants et 2.120 combattants des deux bords-, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
"Les opérations militaires à Raqa ont pris fin. La ville est sous le contrôle total" des FDS, a indiqué à l'AFP Talal Sello, un porte-parole de cette alliance de combattants kurdes et arabes entrée début juin dans la cité.
"Tout est fini à Raqa (...) Il y a actuellement des opérations de ratissage pour éliminer les cellules dormantes, si on en trouve, et pour déminer la ville", a-t-il ajouté.
'Dieu merci, Dieu merci'
C'est en novembre 2016 que les FDS avaient lancé leur offensive "Colère de l'Euphrate", oeuvrant d'abord à conquérir les territoires autour de Raqa, pour isoler la ville et couper les principaux axes de communication avec l'extérieur.
Dès le mois de juin, ses combattants entrent dans la métropole, avec l'appui des frappes aériennes de la coalition internationale emmenée par Washington.
Raqa était devenue le symbole des pires atrocités commises par l'organisation jihadiste, qui y aurait planifié les attentats sanglants ayant frappé plusieurs pays, notamment en Europe.
Pour Oum Abdallah, qui a fui sa ville natale de Raqa il y a trois ans, "la joie est indescriptible".
"Quand ma soeur m'a annoncé la libération, elle a commencé à pleurer et moi aussi, Dieu merci, Dieu merci", lance la quadragénaire installée à Kobané, à une centaine de km au nord de Raqa.
Mardi, les FDS ont pris le contrôle du principal hôpital et du stade municipal dans le centre de la ville, les deux derniers réduits dans lesquels étaient retranchés des dizaines de jihadistes étrangers.
La veille, le rond-point d'Al-Naïm (paradis en arabe), rebaptisé rond-point de l'enfer à l'époque des jihadistes, est tombé aux mains des FDS.
Ces derniers jours, en vertu d'un accord négocié par des responsables locaux et des représentants tribaux, les derniers civils pris au piège ont pu être évacués et les jihadistes syriens ont été autorisés à quitter la ville, selon les FDS.
Quelque 275 jihadistes syriens et leurs familles ont été évacués vers des lieux non précisés.
Dernier bastion
La coalition internationale avait dit, elle, son opposition au départ des jihadistes étrangers de Raqa.
"La dernière chose que nous voulons, c'est que les combattants étrangers soient libérés et qu'ils puissent retourner dans leur pays d'origine et causer plus de terreur", a expliqué le porte-parole de la coalition, le colonel américain Ryan Dillon.
Depuis des mois, l'organisation ultraradicale subit revers après revers en Syrie et en Irak.
En Syrie, le groupe ne contrôle plus que quelques poches dans le centre du pays, notamment dans la province de Hama ou dans le désert de Homs. Il est également présent, en nombre restreint, dans la périphérie sud de Damas.
Son dernier bastion est désormais la province de Deir Ezzor (est), mais il en a perdu la moitié en moins de deux mois.
"En perdant Raqa, l'EI se trouve confiné dans une bande de territoire le long de la vallée de l'Euphrate, à Deir Ezzor", assure Nicholas Heras, expert du Center for a New American Security à Washington.
Mais là aussi, les jihadistes sont confrontés à deux offensives distinctes: d'un côté les forces du régime syrien, soutenues par l'aviation russe, de l'autre les FDS.
En Irak, l'EI ne contrôle plus que deux villes dans l'ouest désertique.
Déclenché en 2011 par la répression gouvernementale de manifestations pacifiques, le conflit en Syrie s'est complexifié avec l'implication de pays étrangers et de groupes jihadistes, sur un territoire de plus en plus morcelé.
Il a fait plus de 330.000 morts et des millions de déplacés et réfugiés.
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