M. Kurz, qui a provoqué ce scrutin anticipé, mettant fin à dix années de grande coalition avec les sociaux-démocrates du chancelier Christian Kern, a toutes les cartes en main pour devenir le plus jeune dirigeant européen.
Son parti chrétien-démocrate (ÖVP) est crédité de 31,7% des suffrages, devant le SPÖ de M. Kern qui obtient 26,9% des voix selon les projections de la télévision publique ORF.
Dans l'attente des résultats définitifs publiés à partir de lundi pour inclure l'important vote par correspondance, la formation d'extrême droite FPÖ de Heinz-Christian Strache se classerait troisième avec 26% des suffrages, mais apparaît en position de faiseur de roi.
Si M. Kurz n'a exclu aucune option, une coalition avec le FPÖ est considérée comme l'hypothèse la plus probable. "Je mènerai des discussions avec tous les partis. Je veux des partenaires pour un changement", s'est-il contenté de déclarer dimanche.
Comme M. Kurz, ses concurrents se sont gardés de dévoiler leur jeu quant aux futures négociations gouvernementales, qui pourront durer plusieurs semaines. "Il est trop tôt", a déclaré M. Strache. M. Kern a assuré de son côté: "Nous voulons des responsabilités. On verra sous quelle forme."
En 2000, l'arrivée du FPÖ au gouvernement, en coalition avec les conservateurs, avait provoqué un tollé européen et l'adoption de sanctions de l'Union europénne contre Vienne.
Fermeté sur l'immigration
Dans un contexte de montée des partis populistes et anti-migrants dans l'UE, une telle levée de boucliers apparaît aujourd'hui peu probable. Le parti allemand de droite radicale AfD a réalisé fin septembre une percée historique aux législatives allemandes, décrochant la troisième place du scrutin.
"Le FPÖ est aujourd'hui un parti différent. La campagne a été marquée par le ton modéré" du parti, estime Marcus Kronberg, un militant ÖVP de 23 ans, favorable à une coalition avec M. Strache.
Une telle alliance pourrait infléchir la ligne jusqu'à présent très europhile du pays, le FPÖ prônant notamment un rapprochement avec le groupe de Visegrad, comprenant des pays comme la Pologne et la Hongrie qui multiplient les bras de fer avec Bruxelles.
A une Autriche prospère mais insécurisée par la crise migratoire, M. Kurz a présenté une image de modernité et un discours de fermeté sur l'immigration.
Ministre des Affaires étrangères depuis 2013, il avait été à l'automne 2015 un des premiers ténors européens à critiquer la politique d'accueil de la chancelière allemande Angela Merkel, et se targue d'avoir obtenu la fermeture de la route des Balkans.
Il a depuis encore durci sa ligne, réclamant une réduction des aides sociales pour les étrangers, au point que le FPÖ l'accuse d'avoir "plagié" son programme. "60% des Autrichiens ont voté pour le programme du FPÖ", a martelé dimanche M. Strache.
Grand, le costume ajusté et les cheveux châtain clair invariablement coiffés en arrière, le jeune conservateur avait créé la sensation en mai en prenant le contrôle de son parti en pleine déconfiture.
S'il parvient à former une coalition, il deviendra le plus jeune dirigeant d'Europe, devant le Premier ministre irlandais Leo Varadkar (38 ans) et le président français Emmanuel Macron (39 ans).
Gouvernement 'noir-bleu'
De son côté, M. Strache, qui renoue avec le score historique recueilli par son ex-mentor Jörg Haider en 1999, avait indiqué qu'il revendiquerait pour son parti plusieurs ministères régaliens en cas d'entrée au gouvernement, dont l'Intérieur et les Affaires étrangères.
Pour le quotidien de centre-gauche Standard, "le FPÖ comme partenaire de gouvernement ne ferait pas bonne impression en Europe et M. Kurz est conscient de ça. Mais la question est de savoir s'il y aura moyen de faire sans lui après l'élection".
Aux cris de "Nazis Raus (dehors, ndlr)", quelque 200 personnes ont manifesté dimanche soir dans le centre de Vienne contre une coalition "noir-bleu".
Ulrike Lunacek, la patronne des Verts, craint que l'Autriche prenne "un cap anti-UE" si le FPÖ entre au gouvernement. Son parti a subi une déroute et pourrait échouer en-deçà de la barre des 4% nécessaires pour siéger au parlement où il est présent depuis 31 ans.
Deux petits partis (les libéraux des Neos et une liste verte dissidente) semblent également en mesure de siéger au parlement.
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