Cet appel, évoqué par plusieurs médias, a été initié vendredi par une journaliste travaillant pour la Lettre de l'audiovisuel, Sandra Muller. Dans son tweet, celle-ci invite à raconter, "en donnant le nom et les détails, un harceleur sexuel que tu as connu dans ton boulot".
Pour montrer l'exemple, elle a elle-même relaté des propos tenus par un ancien patron ("Tu as des gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit"), en citant son nom.
Dimanche, à 13H00, le hashtag #balancetonporc cumulait 26.900 tweets. Figurant depuis minuit dans le top 10 des hashtags les plus populaires, il était passé numéro un à 6H00.
Un emballement qui "n'étonne absolument pas" Marilyn Baldeck, déléguée générale de l'Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT), interrogée par l'AFP. "Il suffit qu'on tende la perche" aux femmes pour qu'elles parlent.
Témoignages de femmes visant des supérieurs hiérarchiques anonymes, des responsables de stages ou évoquant des épisodes de harcèlement dans la rue se sont multipliés. Avec en retour, des manifestations de solidarité masculine, mais aussi des réactions mettant en cause ces déclarations, sous le hashtag inversé #balancetatruie, ou les jugeant exagérées.
Outre les agressions physiques ou verbales sur le lieu de travail, beaucoup racontent aussi celles du quotidien, les attouchements dans les transports, les injures dans la rue.
'système de prédation'
A une internaute qui parle d'un "vieux croûton de 70 ans qui me reluque de haut en bas dans le métro pour me dire que je suis charmante avec un clin d'oeil", un autre répond : "regarder, complimenter, être vieux, cligner des yeux, être un homme, respirer, c'est du harcèlement sexuel!"
Ce n'est pas la première fois que le sexisme au travail ou le harcèlement de rue est dénoncé sur internet. Plusieurs sites à l'image de "Paye ta blouse", lancé en janvier par deux étudiantes en médecine, témoignent du quotidien de nombreuses femmes, entre blagues grasses et franches allusions sexuelles.
Mais, à chaque fois, les affaires médiatisées, comme aujourd'hui le scandale Harvey Weinstein, du nom du producteur américain accusé de viol et de harcèlement sexuel, réveillent la parole des femmes. "Le plus triste en fait, c'est qu'on ait toutes une anecdote", notait dimanche une internaute sur Twitter.
Selon Marilyn Baldeck, "il y a quand même un peu cette idée qui circule que si les choses n'avancent pas aussi vite (en matière de lutte contre le harcèlement, ndlr), c'est parce que les victimes elles-mêmes n'en parlent pas suffisamment". La déferlante de témoignages sur Twitter, "pour moi, c'est la preuve du contraire. Il suffit qu'on leur offre les moyens d'en parler".
En 2016, après l'affaire Denis Baupin (le député écologiste accusé d'agressions et de harcèlement sexuels par plusieurs élues écologistes, ce qu'il nie, et dont l'enquête a été classée sans suite), le nombre de saisines de l'AVFT "a triplé". "Mais ce ne sont pas des femmes qui parlaient pour la première fois, elles se débattaient depuis des années dans des procédures infructueuses", précise Mme Baldeck.
Dans une tribune au JDD, Isabelle Adjani dénonce le "système de prédation" révélé par le scandale Weinstein et souligne qu'"en France, c'est autrement sournois".
La secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, a quant à elle annoncé en septembre la mise en place d'un groupe de travail chargé de plancher sur la pénalisation du harcèlement sexuel dans la rue.
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