"L'avenir qu'on leur propose, c'est le précariat", affirme Eric Coquerel, député de La France insoumise (LFI). "Leurs conditions d'études se dégradent, avec la baisse des APL (allocations personnalisées au logement), des inscriptions en fac impossibles pour certains, et une sélection qui se prépare", ajoute-t-il, évoquant les négociations en cours pour modifier les conditions d'accès à l'université.
Depuis début octobre, des députés de LFI se rendent sur les campus universitaires pour mobiliser les jeunes, dont plus d'un quart ont voté pour Jean-Luc Mélenchon. "Traditionnellement, il n'y a pas de mobilisation massive avant la Toussaint. Donc là, on sème des graines", explique Eric Coquerel.
La ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal recevra jeudi la synthèse des propositions de tous les acteurs du secteur pour réformer l'entrée à la fac, mettre fin au tirage au sort et réduire le taux d'échec en première année à l'université. La ministre, qui a lancé cette concertation en juillet, rendra ses décisions début novembre.
Lundi dernier, le Premier ministre Edouard Philippe a veillé à recevoir les représentants des deux principaux syndicats étudiants, la Fage et l'Unef.
"Si la loi ne va pas dans le bon sens, on appellera les étudiants à se mobiliser de manière assez large, avec pétitions et manifs", avertit Lilà Le Bas, présidente de l'Unef, fermement opposée à toute forme de sélection ou de conditions à remplir pour s'inscrire dans une filière. "Si au final les étudiants se retrouvent avec moins de droits, pour nous ce sera inacceptable."
Pour le moment, Jimmy Losfeld, président de la Fage, perçoit chez les jeunes plus de la "morosité", voire "une forme de désespoir", que de la révolte. "Que veut ce gouvernement pour la jeunesse? Pour l'instant, le cap n'est pas clair."
Fin du tirage au sort
Une chose est sûre: les jeunes sont pour l'heure restés discrets dans les mobilisations syndicales organisées depuis la rentrée contre les ordonnances réformant le Code du travail.
Depuis les grands mouvements lycéens et étudiants contre la loi Devaquet (fin 1986), qui prévoyait une sélection pour l'entrée en fac, la donne a changé, rappelle Jimmy Losfeld. "Les jeunes ne veulent surtout plus du tirage au sort", perçu comme profondément injuste.
Pour cette rentrée 2017, des dizaines de milliers de bacheliers ont été écartés des filières de leurs choix à la fac par le tirage au sort --seul dispositif légal pour départager les candidats-- en raison de la hausse démographique.
Cette loterie, qui existait déjà mais qui a atteint cette année un niveau inédit, a placé la plateforme d'admission post-bac (APB) sous le feu des critiques. APB sera remplacée en 2018 par un nouveau système, qui prendra en compte les conclusions de la négociation sur l'entrée à la fac.
Attention à ne pas accumuler trop de sujets qui fâchent, prévient le président de la Fage. Si le gouvernement impose une véritable sélection à la fac et un mois de service militaire obligatoire, évoqué par Emmanuel Macron pendant sa campagne, en plus de la baisse des APL (aides personnelles au logement), alors les motifs de mécontentement pourraient "coaguler", prévient-il.
Matignon rappelle que ces nouvelles modalités d'entrée à l'université s'accompagneront d'un plan étudiants. "Il ne s'agit pas de répondre pour acheter du calme", assure un proche du Premier ministre. "L'autre pan de la réforme étudiante", insiste-t-il, c'est "une transformation des conditions de vie" avec des mesures sur la santé, le logement et le pouvoir d'achat.
Le parti présidentiel cherche aussi des relais chez les lycéens et les étudiants, via l'association des "Jeunes avec Macron". "L'idée est de faire de la pédagogie dans les universités" afin de "ne pas laisser le terrain à La France insoumise", souligne le jeune député Pierre Person.
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