La "revue stratégique" des armées, rédigée par un comité de 16 personnalités dont l'eurodéputé Arnaud Danjean, a été présentée mercredi en Conseil de défense et sera remise vendredi au chef de l'État.
Ce document de 50 pages établit les "intérêts et priorités stratégiques" de la France au vu de l'environnement géopolitique "actuel et prévisible", résume une source proche du dossier.
Il actualise le Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité nationale adopté en 2013, sous la présidence de François Hollande, à la lumière de la série d'attentats jihadistes qui ont secoué la France et l'Europe ces deux dernières années.
Depuis cette date, l'amplitude de la menace terroriste a changé, les menaces russes et cyber ont augmenté tout comme "les incertitudes liées à certains partenaires clés", avec le Brexit et l'élection de Donald Trump, souligne-t-on de source diplomatique.
Après avoir laissé planer le doute sur les engagements américains en Europe, Donald Trump menace de remettre en cause l'accord sur le nucléaire iranien, au risque de rouvrir la boîte de Pandore de la prolifération nucléaire, et de "détruire totalement" la Corée du Nord qui le défie quotidiennement sur ce terrain.
La défense européenne, dont Emmanuel Macron a fait l'une de ses priorités, occupera logiquement une place de choix au coeur de ces enjeux.
'Risque d'embrasement'
"Le phénomène terroriste est aujourd'hui la menace la plus visible et la plus perceptible", relevait le chef de l'État le 13 juillet, en évoquant la revue stratégique.
"Mais elle est loin d'être la seule. L'émergence, la réaffirmation des politiques de puissance, font peser le risque de voir de nouveau le monde s'embraser", ajoutait-il dans une allusion à la Russie, la Chine ou l'Iran.
Une fois le décor stratégique planté, l'exécutif va appréhender les missions futures des armées, notamment sur les théâtres d'opérations extérieures.
En Afrique, la France souhaite que les États de la région prennent progressivement en charge leur défense, à commencer par la force conjointe du G5 Sahel qui démarrera prochainement ses opérations.
Cela va-t-il se traduire par une inflexion de l'engagement militaire français, notamment au Sahel où l'opération Barkhane mobilise 4.000 hommes, sur fond de forte contrainte budgétaire?
"Aujourd'hui il est probablement impossible d'imaginer un retrait de l'opération Barkhane", concède la ministre des Armées, Florence Parly. Mais il faudra peut-être "moduler" autrement ces opérations, relève l'état-major.
"L'édredon dans la valise"
L'effondrement du groupe État islamique (EI) en Irak et Syrie devrait aussi rapidement donner des marges de manoeuvre pour réduire la présence militaire française dans cette région.
La revue stratégique débouchera au premier semestre 2018 sur une loi de programmation militaire (LPM) qui déclinera les moyens alloués aux armées sur sept ans (2019-2025) en fonction de leurs missions.
Le président Macron a promis une hausse du budget des Armées de 1,7 milliard par an durant son quinquennat afin de porter l'effort de défense à 2% du PIB d'ici à 2025.
Des discussions "tendues, difficiles" ont d'ores et déjà démarré avec les trois armées (Terre, Air, Mer) sur la répartition des moyens, constate le Secrétaire général pour l'administration (SGA) du ministère des Armées, Jean-Paul Bodin.
"Il va falloir faire entrer l'édredon dans la valise", a-t-il dit mercredi au Sénat en soulignant que "les besoins dépassent largement les ressources".
"Ce qu'on peut espérer, c'est une remise en ordre des missions et une adéquation entre les missions et les moyens", analyse le général Vincent Desportes, professeur à Sciences Po.
Il convient, selon lui, de "resserrer" les missions et la "zone d'action" de l'armée française à ce qui est dans l'intérêt "immédiat" de la France, "c'est-à-dire le sud-méditerranéen et l'Afrique".
Faute de quoi, "on aura du mal à obtenir la remontée en puissance" de l'armée française que le président appelle de ses voeux, estime-t-il.
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