Il revient désormais aux juges d'instruction de se prononcer sur la tenue d'un éventuel procès pour cet ancien chauffeur d'hôtel, soupçonné d'avoir transporté des Interahamwe. Ces miliciens extrémistes hutu furent le fer de lance du génocide des Tutsi, qui fit 800.000 morts selon l'ONU.
Réfugié en France, dont il a obtenu la nationalité en 2010, Claude Muhayimana avait été arrêté en avril 2014 à Rouen, où il était employé municipal. Il avait alors été mis en examen pour génocide et crimes contre l'humanité dans cette enquête ouverte en 2013 après une plainte du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), une association qui traque les génocidaires présumés.
Quelques semaines plus tôt, la cour de cassation avait refusé de l'extrader, comme elle l'a fait jusqu'à présent pour les personnes accusées de génocide par Kigali.
Placé en détention provisoire, il avait été libéré en mars 2015, contre l'avis du ministère public.
Fin septembre, le parquet de Paris a requis son renvoi aux assises pour "complicité par aide et assistance de génocide et de crimes contre l'humanité" commis sur le ressort de la préfecture de Kibuye (ouest), au bord du lac Kivu, "entre le 7 avril et la fin du mois de juin 1994", selon cette source.
Le ministère public ne retient que sa complicité dans l'attaque contre l'école de Nyamishaba en avril et le transport des miliciens qui poursuivaient les civils tutsi réfugiés sur les collines avoisinantes "de Karongi, Gitwa et Bisesero", a indiqué cette source.
Claude Muhayimana reste également mis en examen, notamment pour sa participation aux tueries qui ont fait des milliers de morts dans une église de Kibuye le 17 avril 1994, et dans le stade Gatwaro le lendemain, ainsi que pour le meurtre de deux collègues de son hôtel. Des actes pour lesquels le parquet a requis l'abandon des poursuites, faute de preuves suffisantes.
Le suspect a aussi invoqué un alibi qui prouverait son absence sur les lieux une partie du mois d'avril.
"Nous sommes un peu déçus car il s'agit des massacres les plus importants, mais nous notons positivement la demande d'un renvoi aux assises", a réagi Alain Gauthier, le président du CPRC joint par l'AFP.
"C'est un réquisitoire de compromis", s'est étonné l'avocat de la défense, Me Philippe Meilhac. "Le parquet abandonne la part la plus lourde des charges mais d'un autre côté fait le choix de ne pas trop en jeter".
"Il ne reste quasiment que les faits de transport. Or, on imagine l'état de contrainte auquel n'importe quel chauffeur a pu être soumis à cette époque", a-t-il ajouté.
Quelque 25 dossiers liés aux massacres de 1994 sont instruits actuellement au pôle d'enquêteurs et de magistrats spécialisés dans les crimes contre l'humanité. Ce pôle a été créé en 2012 à Paris face à l'accumulation des plaintes concernant ce génocide, dont plusieurs auteurs présumés s'étaient réfugiés en France.
À ce jour, leur travail a débouché sur deux grands procès en France: celui du Rwandais Pascal Simbikangwa, dont la peine à 25 ans de prison a été confirmée en appel, et celui de deux anciens maires rwandais, condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité et qui ont fait appel.
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