Un mois après l'ouragan, les rumeurs sont moins présentes, mais les fausses informations qui ont circulé, sur place et sur les réseaux sociaux, ont nuit à l'image des îles, a déploré la ministre des Outre-mer, Annick Girardin.
Au coeur de la crise, nombreux ont affirmé que des centaines de morts "flottaient dans les rues" ou "remontaient à la surface" au bord des plages. Une journaliste de l'AFP, à la recherche de ces cadavres d'un bout à l'autre de l'île, n'en a vu aucun. D'autres journalistes et la Croix-Rouge ont aussi souligné n'avoir pas vu de corps. Le nombre officiel de morts s'élève à 11.
Les cadavres ont été "cachés" par l'Etat, parfois même "dans des conteneurs frigorifiques", assurait-on sur place ou sur les réseaux sociaux.
Pour Pascal Froissart, chercheur qui s'est penché sur ce phénomène des rumeurs, celles-ci sont "toujours les mêmes, il y a assez peu de variation". Elles "reprennent un fond folklorique, ethnographique, culturel très fort: les morts cachés, la vacuité du pouvoir, les hordes sauvages, de vieux motifs sur lesquels on a déjà brodé pas mal de contes et légendes", explique-t-il à l'AFP.
"Contrairement à ce qu'on pense, ce n'est pas l'absence d'information, mais l'omniprésence de l'information, qui provoque les rumeurs", insiste le chercheur. "Pendant la catastrophe, il n'y a bien sûr pas d'informations, mais les rumeurs circulent juste après, quand on retrouve téléphonie, radio, etc...".
Sur place, les observateurs ont noté le sentiment chez beaucoup de personnes, qu'un ouragan aussi dévastateur ne pouvait pas avoir fait si peu de victimes, comme si l'importance du phénomène climatique ne pouvait être mesurée qu'à l'aune du nombre de morts.
"C'est la question de savoir +qu'est-ce que c'est finalement une catastrophe+?", remarque M. Froissart, soulignant "un problème de hiérarchisation de l'information", liée à "la loi du mort kilométrique" des médias, pour qui "dix morts proches de chez soi, c'est toujours plus important que 1.000 morts à l'étranger".
Préfète "en fuite" ?
Pour Annick Girardin, "l'Etat a été privé de communication", pendant cette crise. "Les réseaux sociaux ont pris le relais et la rumeur a envahi complètement ces réseaux", a-t-elle déploré lors d'un débat sur le tourisme outre-mer, regrettant une "destruction de l'image de ces territoires".
"Sans téléphone, sans internet, les rumeurs aggravent les difficultés", a-t-elle tweeté lors de son déplacement à Saint-Martin, démentant par exemple celles affirmant que la préfète déléguée de Saint-Martin était "en fuite".
Le gouvernement a aussi dû rassurer la population après une rumeur d'évasion massive de détenus dans la partie néerlandaise de l'île, relayée par erreur par une gendarme. Une fausse information issue "de légendes sur les prisonniers évadés, mais qui souvent s'appuie sur des réalités, puisqu'en Afrique, il y a peu de temps, une prison s'est vidée quasi en totalité", relève M. Froissart. "Il ne faut pas penser que l'esprit humain va chercher des choses invraisemblables".
Des rumeurs surtout relayées par les médias ou les autorités, note le chercheur. "Car pour démentir une rumeur, il faut paradoxalement la citer. Et si 99% des personnes vont croire le démenti, une infirme minorité va toujours douter".
Une partie des rumeurs, portant notamment sur l'incompétence de l'Etat, est par ailleurs "clairement récupérée politiquement" et relayée "par la fachosphère" et sa "rhétorique anti-système", explique M. Froissart.
Quant aux rumeurs de "hordes cagoulées et armées", qui ont mis "à feu et à sang" Saint-Martin, comme l'ont raconté réseaux sociaux et habitants, elles partent de cas de pillages réels, mais dans des proportions bien moindres que celles décrites.
Personne par exemple n'a été "abattu parce qu'il refusait de descendre de sa voiture", et aucune gendarmerie ou armurerie n'a été pillée. Au total, 105 personnes ont été interpellées et onze placées en détention à la suite des pillages, selon la justice.
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