"Il y a un sentiment de malaise, les gens sont anxieux, ont peur de troubles importants. Ils sont très tournés vers le Sud. Ils y ont des attaches familiales, y partent en week-end, vont souvent à Barcelone", indique à l'AFP Jean-Luc Pujol, maire UDI de Fourques et cofondateur du parti "Oui au Pays Catalan".
"En Catalogne Nord, les indépendantistes sont très minoritaires. Mais une bonne partie des gens ont beaucoup de sympathie pour les Catalans (du Sud) et sont prêts à défendre leur identité. Mais sans vouloir sortir de l'Etat français", a souligné le responsable de ce parti créé en octobre 2016 et qui milite pour davantage d'autonomie de la "Catalogne Nord", française depuis 1659.
"Aujourd'hui, nous au Nord, on a un projet de statut spécifique pour la Catalogne Nord qui s'inscrit dans le cadre de la Constitution française, comme cela existe en Corse. On est à des années lumières de l'indépendance" comme en Catalogne, a confirmé Jaume Roure, président d'Unitad Catalana, un des plus vieux partis catalanistes des Pyrénées-Orientales.
Si la crise catalane "peut renforcer un sentiment identitaire", "l'attachement à la France dans les Pyrénées-Orientales est très très fort", a insisté le maire LR de Perpignan Jean-Marc Pujol.
Les séparatistes catalans envisagent de déclarer l'indépendance après la publication de résultats définitifs d'un référendum d'autodétermination organisé le 1er octobre et qu'ils ont remporté avec 90% des suffrages et 43% de participation.
Depuis sa tenue, deux manifestations ont rassemblé environ 500 personnes dans le calme à Perpignan en solidarité avec les voisins du Sud et pour condamner la répression des forces de l'ordre. Le maire de Perpignan avait qualifié sur son blog ces violences d'"insupportables, injustifiables et inqualifiables".
"Ca va être le bordel"
Certains militants ont même pris une part active à la préparation de cette consultation interdite par Madrid.
Selon "Oui au Pays Catalan", "plusieurs millions de bulletins" ayant servi au référendum ont ainsi été imprimés par des sociétés installées dans les Pyrénées-Orientales.
"On a une situation très dangereuse parce que le gouvernement espagnol est disqualifié pour négocier", juge Jean-Paul Alduy, ancien sénateur-maire centriste de Perpignan.
Mais "de l'autre côté, Puigdemont (Carles, président indépendantiste catalan) est obligé d'aller sur la voie qui lui reste, celle de la déclaration d'indépendance. Il faut maintenant une médiation internationale", selon lui.
Dans les milieux économiques, l'inquiétude domine face aux perspectives d'une indépendance de la Catalogne. "Cela me paraît assez irréaliste. La Catalogne serait obligée de quitter l'Europe, cela me paraît compliqué", a mis en garde Bernard Fourcade, président de la Chambre de commerce et d'industrie départementale.
"Personne ne parle de la problématique économique. Peut-être, que dans quelques temps, on se mordra les doigts", a-t-il insisté.
Pour Raymond Mitjavila, chef d'entreprises implantées en France et en Espagne, notamment en Catalogne, "économiquement, cela va être le bordel". "On fait 45% de notre chiffre d'affaires en Espagne. Et dans les autres provinces, on en veut aux Catalans".
"C'est embêtant, ce qui se passe. De coeur, je suis avec eux (les indépendantistes), mes parents sont partis à cause de Franco, mais ce qui se passe, cela fait peur", a-t-il ajouté.
Le département des Pyrénées-Orientales a longtemps fait partie de la Catalogne. Il est devenu français en vertu du traité des Pyrénées signé le 7 novembre 1659 par les royaumes de France et d'Espagne. De nombreux Républicains catalans fuyant la dictature franquiste s'y sont installés.
Sa population reste attachée à la culture catalane, mais elle est très majoritairement éloignée des revendications indépendantistes qui existent de l'autre côté de la frontière. Si la Catalogne est la région la plus riche d'Espagne, les Pyrénées-Orientales comptent parmi les départements les plus pauvres de France.
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