"Sauf miracle", "nous n'aurons pas de progrès suffisants" pour ouvrir "d'ici à la fin du mois d'octobre" une nouvelle phase de discussions avec Londres sur les futures relations commerciales, a affirmé à son arrivée à Tallinn le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker.
"Il y a clairement une meilleure ambiance" mais "il est évident que plus de travail doit être fait", a renchéri le Premier ministre irlandais Leo Varadkar.
Ces réserves apparaissent au lendemain de la conclusion d'un nouveau round de négociations entre Londres et Bruxelles sur les modalités du divorce, prévu fin mars 2019.
"Nous sommes loin encore d'atteindre le moment - il faudra plusieurs semaines ou plusieurs mois - où nous pourrons constater des progrès suffisants", avait déjà nuancé jeudi le négociateur en chef de la Commission européenne pour le Brexit, Michel Barnier.
Les Britanniques pressent l'UE d'accéder à la deuxième phase des négociations, au cours de laquelle pourra être abordée la question de la future relation entre les deux parties, notamment sur le plan commercial.
Mais les 27 lient le passage à cette nouvelle étape, initialement prévue pour cet automne, au constat de "progrès suffisants" dans trois domaines jugés prioritaires: la garantie des droits des citoyens, les conséquences du Brexit pour l'Irlande et le "solde des comptes" entre Londres et l'UE.
"De très bons progrès ont été faits, cela a été clairement établi dans les déclarations faites hier" à Tallinn, a cependant plaidé la Première ministre britannique Theresa May vendredi, se voulant bien plus optimiste.
'Large consensus'
Face à cette actualité brûlante, l'Estonie peine à faire exister la dimension numérique de son sommet, un dossier qui lui tient pourtant à coeur.
D'autant plus que la question de l'avenir de l'Europe, relancée mardi par un discours du président français Emmanuel Macron à La Sorbonne, occupe aussi les discussions des chefs d'Etat et de gouvernement.
Les propositions françaises en faveur d'une Europe "à plusieurs vitesses" autour d'un couple franco-allemande consolidé étaient ainsi au menu d'un dîner informel jeudi soir entre les dirigeants européens.
Theresa May était présente, alors que le Royaume-Uni n'avait pas été convié aux précédentes rencontres informelles sur le sujet.
"Nous avons eu une bonne discussion", s'est félicité Donald Tusk, le président du Conseil européen, qui compte proposer "dans deux semaines" un "agenda politique" sur les réformes de l'UE pour 2017 et 2018.
"Je vois (...) dans le discours du président (Macron) une bonne base afin de continuer à travailler de façon intensive entre l'Allemagne et la France", a pour sa part affirmé jeudi la chancelière allemande Angela Merkel, en estimant qu'il existait "un large consensus" entre les deux voisins sur les réformes à mener.
'Prise de conscience'
Le Français et l'Allemande se sont entretenus en tête-à-tête pendant une demi-heure jeudi soir, sans entrer dans les détails des propositions françaises, notamment sur la zone euro, les plus sensibles pour Berlin.
Après sa victoire étriquée aux législatives dimanche, Mme Merkel n'a d'autre choix que de trouver un accord pour gouverner avec les Libéraux du FDP, opposés aux idées de Paris sur la question.
La discussion de jeudi doit "a montré une prise de conscience collective", a résumé vendredi Emmaneul Macron, qui devrait pousser dans l'après-midi en faveur d'une autre de ses propositions, visant à mieux taxer en Europe les géants du numérique, comme Apple ou Google.
"Ce thème sera le plus controversé" du sommet numérique, bien qu'il ne soit pas officiellement inscrit à l'agenda, a prévenu une source européenne.
Les grands groupes du numérique sont accusés de pratiquer l'optimisation fiscale en transférant artificiellement les bénéfices réalisés dans toute l'UE dans un seul Etat membre --comme l'Irlande ou le Luxembourg-- où elles bénéficient d'un taux d'imposition avantageux.
La France aimerait appliquer une taxe sur le chiffre d'affaires généré dans chaque pays européen et non pas sur les bénéfices.
L'idée a reçu le soutien d'une dizaine de pays, dont l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne, mais l'Irlande y est farouchement opposée.
Le sommet numérique sera également consacré à la cybersécurité et à la libre-circulation des données, que l'Estonie, petit pays balte à l'avant-garde sur le sujet, considère comme des priorités pour l'UE.
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