Après des mois d'un long feuilleton sur la reprise ou non du site de Saint-Nazaire par son concurrent transalpin - une incertitude handicapante pour engranger de nouvelles commandes de paquebots - "la situation s'éclaircit" pour Damien Thébault, employé depuis 23 ans au chantier naval et responsable de travaux sur l'un des paquebots en construction. Soupesant le pour et le contre de l'arrivée de l'italien Fincantieri, il estime que "les premiers mois seront décisifs".
"On ne pouvait pas rester sans racheteur. On était dans le doute, on ne savait pas où on allait, c'est mieux. (...) Mais Fincantieri, ça dépend: qu'est-ce qui est prévu vraiment dans les clauses du contrat", s'interroge Dominique Chedotan, salarié depuis 1988 aux ex-Chantiers de l'Atlantique.
"Des rachats, j'en ai connu. Des doutes aussi. On a toujours l'inquiétude que le savoir-faire parte à l'étranger et qu'on reste sur le carreau. On est obligé d'attendre", poursuit-il avant de passer par l'un des trois portillons le menant au site, protégé par un grillage et surveillé par des caméras, au bout du parking central.
Au petit matin, des centaines d'ouvriers techniciens ou superviseurs, mais aussi des travailleurs étrangers, certains déjà munis de leur casque de sécurité, s'engouffrent à l'intérieur du chantier naval, en direction des ateliers et du paquebot géant en construction pour l'armateur américain RCCL, client historique de STX, le jumeau du plus grand navire à passagers du monde livré au printemps 2016.
2% aux salariés
"Pressé" de pointer, un salarié lâche juste qu'il ne trouve "pas forcément rassurant" l'accord trouvé entre Paris et Rome, présenté par Emmanuel Macron comme "gagnant-gagnant". Dans les faits, Fincantieri a obtenu 50% de STX, auxquels il faut ajouter 1% "prêté" par l'État français, qui se réserve le droit de le reprendre si l'Italien ne respecte pas ses engagements pendant une période de douze ans.
"La France aurait dû garder les 100%", lance Cyril, en référence à la nationalisation temporaire décidée en juillet faute d'accord trouvé avec l'Italie.
"Fincantieri n'aurait pas dû devenir actionnaire majoritaire. Ce 1% fait toute la différence" pour Samuel, 41 ans, soudeur en tuyauterie et salarié depuis près de 20 ans, qui craint "la concurrence avec les boîtes italiennes".
Pour Pierre, 34 ans, ce 1% "prêté" est au contraire "une bonne chose, car ça laisse un certain levier à la France".
"Je suis assez satisfait que le gouvernement ne se soit pas laissé faire et garde ce droit de veto si ça se passe mal. C'est plutôt rassurant, car Fincantieri reste un concurrent direct et le chantier fait vivre beaucoup de monde ici dans la région", souligne Pascal, employé d'une PME sous-traitante de deuxième rang, qui assure "30 à 40% de son chiffre d'affaires" grâce à STX.
L'accord prévoit que 3,66% du capital reviennent à des sous-traitants du bassin de Saint-Nazaire et 2% aux salariés, qui auront également un siège au conseil d'administration. "C'est bien qu'il y ait un droit de regard des salariés, mais personnellement je n'irai pas mettre de billes dedans. Ce n'est pas une industrie qui rapporte", confie en souriant Gildas, 36 ans, "plutôt optimiste" néanmoins sur l'avenir grâce au carnet de commandes rempli jusqu'en 2026.
Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire doit se rendre dans l'après-midi à Saint-Nazaire pour expliquer les termes de l'accord à la direction et aux représentants des quelque 2.600 salariés, avant de visiter le site.
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