Pur scénario de science-fiction? Pas pour certains experts comme Bernard Foing, expert du programme "Moon Village" de l'Agence spatiale européenne (ESA), qui considère que cet objectif est réalisable.
A l'occasion d'un congrès européen de science planétaire à Riga (Lettonie) cette semaine, Bernard Foing a expliqué à l'AFP à quel rythme, selon lui, les humains pourraient s'installer sur la Lune.
D'ici 2030, il pourrait y avoir une première colonie lunaire comprenant six à dix pionniers (scientifiques, techniciens et ingénieurs), qui pourrait monter à 100 personnes en 2040, a-t-il estimé.
"En 2050, vous pourriez avoir un millier de personnes" sur la Lune et puis on pourrait envisager de "faire venir les familles", a déclaré M. Foing.
Et dans quelques décennies, "il pourrait même y avoir des naissances d'enfants sur la Lune", s'enthousiasme-t-il.
En 2015 le patron de l'ESA, Jan Woerner, a proposé de remplacer la Station spatiale internationale (ISS) en orbite autour de la Terre par un "village lunaire" permanent.
Symbole de la coopération internationale dans l'espace, l'ISS, vieillissante, est financée jusqu'en 2024.
Si les scientifiques et certaines sociétés privées s'intéressent au concept de "Moon village", les politiciens n'ont pas encore mordu à l'idée.
"C'est très frustrant (...) Les grands leaders n'ont pas encore montré leur intérêt", a reconnu le physicien Vidvuds Beldavs de l'Université de Lettonie, qui milite pour l'exploration conjointe de la Lune.
Ce qui manque pour que cela démarre? "Arriver à démontrer qu'une activité industrielle sur la Lune est possible, que (...) de grands marchés peuvent émerger", ajoute-t-il.
Une vie 'dure'
La Lune possède diverses ressources possibles. Le basalte, une roche volcanique, pourrait être utilisée comme matière première pour fabriquer des satellites grâce à l'impression 3D qui pourraient être lancés depuis la Lune, à un coût bien moindre que celui d'un lancement depuis la Terre où la gravité est beaucoup plus importante, souligne M. Beldavs.
L'hélium 3, un isotope rare sur notre planète mais commun sur la Lune, pourrait théoriquement être utilisé pour générer de l'énergie pour la Terre.
La cible principale des chercheurs est d'arriver à exploiter l'eau, enfermée dans la glace des pôles de la Lune.
L'eau peut être séparée en hydrogène et en oxygène, deux gaz qui explosent lorsqu'ils sont mélangés. De quoi alimenter le moteur des fusées.
"Pour aller sur l'orbite terrestre (...) il est 40 fois moins coûteux de partir de la Lune que de la Terre, parce que celle-ci a une telle gravité que vous devez lutter contre elle", a expliqué M. Foing.
Les experts affirment que la colonisation de la Lune passe par la collaboration entre les agences spatiales nationales et le secteur privé, qui pourrait profiter de la commercialisation des ressources lunaires.
Mais avis à ceux qui rêvent de s'installer sur Mars ou la Lune: la vie y sera "dure", souligne la physicienne Christiane Heinicke qui a passé un an dans une simulation d'environnement martien à Hawaï.
Là-haut, "c'est complètement dépourvu de végétation". Tout ce qu'on peut voir "ce sont des roches, des régolites (couches de poussières) et un ciel différent", a-t-elle déclaré à l'AFP par courriel.
"Etre soit à l'intérieur de l'habitat, soit à l'intérieur d'un scaphandre signifie que vous ne pouvez jamais réellement sentir la Lune ou la planète sur laquelle vous êtes. Vous ne pouvez pas sentir le vent (s'il y en a un, comme sur Mars). Vous ne sentez pas le Soleil sur votre peau". Et "vous ne pouvez jamais échapper à vos équipiers".
Mais Bernard Foing n'est pas découragé. Il espère visiter le village lunaire d'ici 2040.
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