- Des peintures aux ordinateurs
Longtemps négligée, "la qualité de l'air intérieur est un sujet de santé publique majeur", souligne Nadia Herbelot, cheffe du service qualité de l'air à l'Agence de l'environnement (Ademe), rappelant que "nous passons 80 à 90% de notre temps" en lieu clos.
Or, "du fait du confinement, on voit souvent que l'air intérieur est plus pollué que l'extérieur".
Dans nos logements, air et poussières au sol contiennent des dizaines de substances chimiques issues de produits de la vie quotidienne, recensait en 2015 l'Observatoire de la qualité de l'air intérieur (OQAI).
Ces "composés organiques semi-volatils" viennent aussi bien d'objets contenant du plastique (revêtements de sol, ordinateurs, câbles, meubles, textiles, etc.), que de produits d'entretien ou de bricolage, de cosmétiques, d'insecticides ou de résidus de combustion (tabac, encens, chauffage au bois).
Ils peuvent irriter les yeux et voies respiratoires. Certains comme le benzène et le formaldéhyde sont classés "cancérogènes" par l'OMS. Ces substances sont aussi suspectées d'effets sur le système nerveux et hormonal.
Autres polluants, les particules et oxydes d'azote, émis notamment par les appareils de cuisson et de chauffage défectueux, exposent à des troubles respiratoires. Idem pour les moisissures.
Un "syndrome du bâtiment malsain" a même été identifié pour définir un ensemble de symptômes variés liés aux conditions de vie dans un lieu.
- Marges de progrès
En 2014, l'Anses avait évalué à près de 20.000 par an le nombre de décès prématurés provoqués par six polluants intérieurs les mieux étudiés (benzène, radon, trichloréthylène, monoxyde de carbone, fumée de tabac, et surtout particules).
"Difficile de dire si la situation générale s'améliore" ou pas, dit Gilles Aymoz, chef du service Bâtiment à l'Ademe. "Les cas sont hétérogènes, ils dépendent des comportements de l'usager, et de la qualité des systèmes de ventilation."
Cette dernière préoccupation n'est pas des moindres.
"Avec les normes de plus en plus contraignantes en matière d'économies d'énergie, on renforce l'isolation, mais du coup, il faut porter une attention croissante à la ventilation" du bâti, explique M. Aymoz.
Depuis 1982, un arrêté impose un dispositif d'aération des logements. Mais "il faudrait commencer à l'appliquer sérieusement", note l'expert.
Côté information du public aussi, des progrès sont à faire.
Selon un sondage TNS-Sofres, quelque 60% des utilisateurs d'encens et de bougies parfumées jugent ces produits sans impact, voire bénéfiques, alors que ces faux amis polluent --en particulier l'encens.
Sortie mi-septembre, une nouvelle étude met en garde contre l'abus de ces deux "sent-bon" émetteurs de particules.
"On s'attaque d'abord aux produits à combustion car la combustion produit beaucoup de polluants", explique Mme Herbelot. Une étude est en cours sur les produits d'entretien. Sachant que "ce qui émet des odeurs peut émettre des polluants", rappelle-t-elle.
- Aérer!
Aux usagers d'abord d'agir: limiter les sources de pollution, ne pas inhaler directement, éloigner les personnes sensibles, enfin et surtout renouveler l'air.
Dès janvier 2019, les emballages des désodorisants à combustion devront comporter des avertissements.
À ce jour, la principale mesure reste l'obligation depuis 2013 d'étiqueter les matériaux de construction et de décoration, en indiquant leur niveau d'émission de substances volatiles. L'étiquetage des meubles en revanche n'est toujours pas acté.
"L'action des pouvoirs publics est plus récente que pour la qualité de l'air extérieur", relève Souad Bouallala, ingénieure spécialisée à l'Ademe, qui relève aussi l'absence de directive européenne.
L'OQAI a été créée en 2001, le premier "plan d'actions sur la qualité de l'air intérieur" lancé en 2013.
Dans le monde, quelques pays ont pris le problème à bras-le-corps, selon une étude coordonnée par Mme Bouallala.
La Corée du Sud notamment impose un contrôle de l'air et des systèmes de ventilation à la livraison des bâtiments neufs. En France, des expérimentations sont menées en ce sens.
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