Car depuis le "Nous y arriverons!" clamé par Angela Merkel il y a deux ans en guise de cri de ralliement avant d'ouvrir les portes du pays à plus d'un million de migrants, la chancelière a dû, sans renier sa politique, mettre un peu d'eau dans son vin.
Et les élections de dimanche constitueront aussi un test pour jauger l'état de l'opinion sur la question.
Les images d'Allemands se déplaçant en masse pour accueillir ces exilés affluant dans les gares ont fait le tour du monde. Beaucoup étaient fiers d'incarner cette "Willkommenskultur" ("culture d'accueil"), prouvant que leur pays était bel et bien du bon côté de l'Histoire.
"Je n'ai pas considéré sa déclaration comme une réalité de fait -+nous allons le faire de suite+- mais plus comme un objectif: en travaillant tous ensemble, réfugiés et Allemands", le pays y arrivera, affirme à l'AFP Moataz Ghannam.
Cet étudiant syrien de 27 ans est entré en arrivant illégalement d'Italie. Après trois mois, il a pu bénéficier du statut de réfugié et va pouvoir poursuivre ses études en gestion à Berlin.
Son intégration a été facilité par la plateforme "Kiron Open Higher Education", une université en ligne qui permet à des réfugiés de faire valider leurs compétences.
Ce projet est l'une des initiatives concrétisant le "Nous y arriverons!". La trajectoire réussie de Moataz Ghannam lui a valu d'être récemment invité par la chancelière à une discussion pour faire le bilan depuis deux ans.
Foyers incendiés
Cependant, tout n'est pas rose. Environ 200.000 demandeurs d'asile ont trouvé à ce jour un emploi légal mais les prévisions pour les autres varient sensiblement.
Au sein de la population allemande, leur arrivée a aussi fait naître frustrations, voire colère aux extrêmes.
Plusieurs centaines de foyers de migrants ont été incendiés et de nombreuses manifestations de l'extrême se sont tenues, notamment dans l'ex-RDA.
La vague d'agressions sexuelles à la veille du Nouvel an 2016 à Cologne impliquant des Nord-africains ou encore une série d'attentats islamistes commis par des demandeurs d'asile ont contribué à alimenter les inquiétudes.
Donnée un temps politiquement moribonde par les médias de son pays face aux critiques dont elle faisait l'objet, y compris au sein de sa famille politique conservatrice, la chancelière a déjoué les pronostics.
Elle aborde dimanche les élections largement favorite pour un quatrième mandat, bien qu'avec des sondages prédisant à son parti un score en repli par rapport à 2013. Le nombre d'arrivées de migrants a fortement baissé suite à la fermeture de la "route des Balkans" et à l'accord passé avec Turquie pour qu'elle stoppe les réfugiés chez elle.
La question, si elle reste agitée par la droite nationaliste, n'apparaît plus au centre des préoccupations de l'opinion et ne constitue pas en tout cas un sujet clivant face à son principal rival social-démocrate Martin Schulz, dont le parti a lui-même soutenu la politique d'ouverture aux réfugiés dans le cadre du gouvernement de coalition actuel.
Décision "justifiée"
Face aux critiques, Angela Merkel a aussi durci le cap de sa politique, avec notamment des renvois facilités pour les migrants illégaux ou condamnés par la justice.
Si elle promet désormais que l'arrivée massive de 2015 ne se reproduira pas, elle vient de dire que sa décision d'alors était "justifiée" par la situation humanitaire et le refus de la Hongrie de Viktor Orban d'accepter les réfugiés.
Ses détracteurs lui reprochent, eux, d'avoir alimenté l'essor du parti nationaliste de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD), crédité d'au moins 10% des intentions de vote et qui va très probablement entrer à la chambre des députés.
L'AfD a fait de la chancelière sa principale cible dans la campagne. Ses militants lui crient "Dégage!" à presque chacun de ses meetings.
Alors, l'Allemagne y est-elle arrivée? "C'est une question de perspective, nous ne le saurons sans doute seulement quand Angela Merkel ne sera plus chancelière", estime la radio publique allemande.
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