Le 20 novembre 2013, Adélaïde, 15 mois, était retrouvée morte à Berck, le visage lové dans sa capuche bordée de fourrure, par un pêcheur de crevettes. Dix jours plus tard, sa mère, Fabienne Kabou, était arrêtée chez elle, à Saint-Mandé, en banlieue parisienne.
"J'ai mis fin à ses jours car c'était plus simple comme ça", avoue-t-elle aux enquêteurs lors de sa garde à vue. Elle leur explique qu'elle s'est rendue à Berck-sur-mer en raison de "la tonalité désagréable du nom" et parce qu'elle savait que dans cette région "la mer montait et descendait sur de grandes distances".
Elle raconte qu'elle a déposé le 19 novembre 2013, sa fille, "Ada", alors "un peu endormie" sur la plage, lui a dit "pardon" puis s'est enfuie, pensant que "la mer allait emporter le corps".
"Tout s'est enchaîné parfaitement, tout était huilé, on aurait dit que j'avais le vent dans le dos. Je n'arrivais pas à dire stop", a-t-elle aussi déclaré.
Pendant sa courte vie, Adélaïde n'avait pas eu d'existence légale, faute d'avoir été inscrite à l'état civil.
Mme Kabou, née à Dakar, a grandi dans un milieu "aisé", "affectueux" où "la religion catholique occupe une place centrale". Après avoir passé son bac au Sénégal, elle a emménagé à Paris, où elle a suivi des études d'architecture puis de philosophie.
Le père de la fillette, Michel Lafon, partie civile, pensait que Fabienne Kabou, comme elle le lui avait dit, avait confié Adélaïde à sa mère, pour qu'elle la prenne en charge pendant une année au Sénégal. "J'ai tout gobé aux mensonges de Fabienne", avait affirmé en première instance le septuagénaire, ancien trader devenu sculpteur.
'Une femme malade'
La responsabilité pénale de Fabienne Kabou, une personnalité jugée par tous comme "très intelligente" mais aussi "déroutante", a été au centre de son premier procès en juin 2016.
Si certains experts ont conclu que l'accusée, qui encourt la réclusion criminelle à perpétuité, présentait une "pathologie psychiatrique de type paranoïa délirante", d'autres ont contesté cette thèse, évoquant simplement "un trouble psychique". Tous ont toutefois retenu l'altération du discernement au moment des faits.
L'accusée, au langage châtié, avait évoqué la "sorcellerie" pour expliquer son geste. "Un mécanisme de défense contre l'effondrement", selon un expert psychiatre, pour cette femme "dépressive". Un autre expert avait décrit "une grande délirante".
L'avocate de l'accusée, Me Fabienne Roy-Nansion, avait jugé le verdict en première instance "effrayant" pour une femme "malade". "Pourquoi Adélaïde est-elle morte ? Parce que sa mère est folle", avait-elle plaidé.
De ce nouveau procès, "j'attends qu'on comprenne qu'il s'agit d'une personne qui a souffert d'un trouble psychique profond au moment des faits. A un moment donné de l'histoire, il va falloir qu'on arrête de condamner des personnes qui souffrent de pathologies mentales à des peines de 20 ans de réclusion criminelle", a dit l'avocate à l'AFP.
Personnalité contradictoire, Fabienne Kabou avait glacé la salle d'audience en parlant de son crime. "Quand je rentre à Paris, j'ai l'attitude de quelqu'un qui est allait faire une course...", avait-elle ainsi déclaré. Mais, parlant d'Adélaïde, elle s'était aussi dite "émerveillée de la voir courir, de l'entendre dire +maman+, de la voir montrer le chocolat noir parce qu'elle adore ça".
Six jours d'audience sont programmés pour ce procès, jusqu'au 15 septembre.
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